Jillah s'étira en baillant, la journée avait été longue et éprouvante et elle rêvait de prendre une bonne douche avant de se glisser dans les draps de son lit pour sombrer dans un sommeil profond et réparateur.

Elle revenait donc tranquillement des refuges où elle avait laissé Salaun, montait tranquillement les escaliers pour atteindre l'étage où se trouvait le dortoir des filles, quand un mouvement attira son attention. Haussant un sourcil, elle tourna la tête et aperçut une fine silhouette se diriger à pas de loups vers la porte au bout du couloir, derrière se trouvait une espèce de placard à balais possédant une porte dérobée menant dans les souterrains sombres et lugubres qu'elle avait eu l'occasion de visiter à son arrivée.

Ce souvenir la fit sourire, mais elle revint au moment présent et suivit la silhouette qui venait de disparaître dans le placard à balais. Bon...elle n'avait pas de lanterne avec elle...cependant, elle n'avait pas le temps d'aller en chercher une et dû se décider à continuer malgré tout. Autant éviter qu'une élève ne se mette en danger et se perde dans le dédale de couloirs constituant les souterrains.

L'idée d'y pénétrer n'enchantait pas vraiment la jeune terra mais elle n'avait pas vraiment le choix. Elle ouvrit rapidement la porte et la referma, frissonnant légèrement d'appréhension, avant de tâtonner pour trouver l'autre porte. On lui aura vraiment tout fait!

La jeune femme se glissa dans l'ouverture et aperçut une faible lueur un peu plus loin, lui permettant de distinguer la silhouette d'une jeune femme blonde. Bon...elle accéléra un peu en faisant le moins de bruit possible, et s'approcha de l'autre élève.

Elle se mordilla la lèvre et se demanda comment l'aborder sans la faire sursauter quand un objet la fit lourdement chuter.

-Aïe...

Ca c'était de la discrétion! Déjà qu'elle s'était pris seaux et balais dans le placard et qu'elle avait réussi, par miracle, à garder son équilibre...pestant intérieurement, elle se releva rapidement en époussetant ses vêtements. Si la jeune fille qu'elle suivait ne l'avait pas remarqué avec tout ça...

La journée avait été longue et pourtant c'était entre les murs du souterrains et non entre ses draps que la demoiselle avait souhaité passer sa nuit, ou du moins, une partie de sa nuit. A l'origine de la décision, un "léger" problème de sommeil. En effet, malgré la rudesse de la journée, Maria se tournait et se retournait sans cesse sous sa couverture, aucune position ne semblait convenir et ses yeux finissaient toujours par se rouvrir. Un petit manège tant énervant que lassant, alors, devant le caprice du sommeil, elle sauta hors de son lit; cette nuit, elle allait se rendre dans les souterrains. Pourquoi les souterrains? Pourquoi pas? L'atmosphère des lieux, la curiosité, le sentiment grisant de sentir explorateur, un pari perdu, tant d’éléments qui poussèrent la jeune ventus à parcourir le dédale. Si seulement elle n'avait pas parié avec une autre élève... Cette dernière décréta que la jeune ventus devait se rendre dans les souterrains récupérer son collier perdu et ce, impérativement avant la fin de la semaine au risque de se voir discréditée. Toucher à la fierté de la demoiselle c'est titiller son point faible, l'autre le savait sûrement. De toute manière, il n'y avait rien d'autre à faire à cette heure-ci, ou peut-être si, mais cela la préoccupait moins.

Déterminée, elle saisit une lanterne, quelques bougies en suppléments plus quelques biscuits, au cas où si elle avait faim sait-on jamais, avant de s'éclipser, le tout dans un grand effort de discrétion. S'aventurer dans les souterrains sans précautions avait toujours été déconseillé... quoique l'idée de s'y rendre était déjà, à la base, fortement déconseillé. Non sans raison d'ailleurs; d'abord d'un point de vu officiel, au regard des règles etc... mais également d'un point de vu plus officieux, né des élèves eux-mêmes. Il existait de nombreuses histoires autour de ces labyrinthes comme autant de légendes transmises de générations en générations d'élèves. La majorité d'entre elles parlaient de disparitions mystérieuses tandis que d'autres évoquaient des fantômes ou de monstres. De quoi rassurer une fois sur place, en pleine nuit, seul. Inutile de préciser que Maria les connaissait -pour en avoir été l'auditrice et la conteuse - mais elle n'en croyait pas un mot, ou du moins, s'en persuadait. Le problème avec ce genre d'histoires c'est qu'en dépit d'une volonté d'acier, elle parvient toujours à s'insinuer dans votre esprit.

C'est ainsi qu'elle se retrouva devant la porte dudit labyrinthe, dissimulé par le plus ordinaire des placards à balais. Bon camouflage, un peu décevant certes, mais excellent dans la manière de se fondre dans le décors. Maria en déverrouilla avec douceur, un léger grincement résonna. Elle entra, referma soigneusement la porte derrière elle avant d'ouvrir le double fond. Lanterne allumée, la jeune femme entra dans le couloirs d'un pas résolu, tout en prenant soin de laisser tomber quelques gouttes de cire sur son passage. Elle soupira; pourquoi avait elle fait ce maudit pari?

*Plus jamais je ne jouerais une partie de cartes.* Se répétait-elle de temps à autre.

Sa main libre frémissait. Elle? Peur? Impossible! La peur ne l'infectait et nul monstre ou fantôme ne pouvait l'impressionner. Non, ce n'était pas la peur qui faisait frémir sa main libre, juste le froid. Qu'est-ce qu'il pouvait faire froid là-dedans! Mais insuffisant pour lui faire tourner les talons! Elle devait trouver ce maudit collier, elle le trouverait! Même s'il fallait y passer la nuit! Tout se déroulait plutôt bien malgré la désagréable sensation d'être épiée.

Un bruit. Quelque chose venait de tomber derrière la jeune femme. Maria bondit, manquant de laisser tomber sa lanterne. Elle se retourna, lança une orbe céleste derrière elle par pur réflexe et ce n'est qu'après qu'elle laissa la lumière éclairer la silhouette. Une jeune femme, la vue d'une humaine fit ralentir son coeur. Après un examen plus attentif, elle fut en mesure d'affirmer qu'elle ne lui disait rien. Enfin pas totalement, sa tête lui disait vaguement quelque chose; sans l'aura t-elle vu dans l'académie. Redressant le menton, noble et fière, elle interrogea la demoiselle:

-Qui êtes-vous et pourquoi me suivez vous? Dit-elle de but en blanc.

Peut-être avait-elle eu tort de se lancer à la poursuite de l'étudiante dans ces fichus souterrains! Mais elle ne pouvait pas laisser une camarade se perdre dans ce labyrinthe! De quoi aurait-elle l'air ensuite!

Alors, après s'être bien emmêlée les pinceaux dans le placard à balais, elle ouvrit la porte dérobée et s'engouffra dans les sombres souterrains, frissonnant d'appréhension. Elle n'avait même pas de lanterne avec elle, mais heureusement, ce n'était pas le cas de celle qu'elle poursuivait. Elle pouvait donc suivre la faible lueur qu'elle apercevait au loin!

Jillah continuait donc d'avancer, tout en se demandant comment aborder l'imprudente sans lui provoquer une crise cardiaque, quand un objet la fit chuter. Elle s'étala de tout son long, comme elle savait si bien le faire, et se frotta le nez tout en se tenant la cheville endolorie de l'autre. Evidemment, sa chute n'avait pas dû passer inaperçue dans le silence régnant dans les souterrains.

Et effectivement, lorsqu'elle releva la tête, la jeune étudiante Terra se retrouva face à une jeune fille blonde visiblement mécontente de la trouver ici.

Refusant de se laisser traiter de la sorte, Jillah se redressa en époussetant sa tunique malgré sa cheville encore douloureuse et planta ses yeux ambrés dans ceux de la jeune fille qui lui faisait face:

-Je suis Jillah le Derrien, étudiante Terra en 5ème année. Et je te suivais car il est dangereux de se promener seule dans les souterrains. Il est facile de s'y perdre lorsqu'on ne les connait pas.

Et même lorsqu'on s'y était déjà rendu de nombreuses fois de toute manière. Enfin, mieux valait ne pas inquiéter l'autre étudiante, car elle-même ne s'y était jamais rendue, hormis lors de sa première année, pour un jeu de piste. Cela faisait donc la seconde fois qu'elle s'y rendait. Et autant dire qu'en pleine nuit, elle ne faisait pas la fière.

Se radoucissant quelque peu, elle sourit à la jeune femme blonde:

-Et toi, que fais-tu ici?