On me pense trop précieux pour ce genre d’endroit ? Au contraire, j’aime cette ville terriblement humaine, surtout qu’il s’agit de la ville préférée de ma sœur dans les ténèbres, Morwen O’Shanahan. D’ailleurs, ce soir-là, pour lui faire plaisir, je m’étais déguisé en femme, Narth car mimer ces dons de la nature demeure une sacrée performance. De plus, après avoir trouvé l’espoir de la survie de notre hôte de marque en la personne d’Hattusha Bepetdvapara-Te-Roroa et avoir fait mon rapport auprès de notre dévoué doyen Haalu, il me fallait un autre visage et une autre monture : mes jambes. Tant mieux, l’escalade dans les Monts Cendrés fut particulièrement rafraîchissante. Non que je ne sois pas satisfait de ma condition d’armurier Wyrm mais ce temps donné était un temps de moins pour ma précieuse famille dont j’allais retrouver quelques membres.

Plus je m’approchais de Morn, plus les nuages bleutés voilaient l’horizon. Morn, le joyau d’eau dérobé de Narthan. Vêtu d’une robe humble Saabi dont les pans léchaient le parterre éploré des ruelles, les plus enhardis me pensaient être une fille de joie commençant tôt son service. Bien. L’artifice tenait. Je gloussais grassement aux remarques colorées en me laissant tâter de temps en temps en rouspétant que mon maquereau ne serait pas d’accord sur le traitement d’une de ses marchandises sans même un sou ce qui dissuadait facilement les autochtones qui respectaient ce système. Quand on comprenait comment roulait le système maître et esclave, c’était comme si on me donnait les clefs de la ville pour que je puisse les avaler tout rond… Les eaux de Noiroc, cette capacité était vraiment utile, pouvant mimer la chair même au toucher. Si je n’étais pas si pressé, je me serais réservé pour ma belle Lamia qui était enroulée contre ma jambe ou peut-être Morwen si elle daignait laisser mes charmes faire son office sans utiliser ma hampe, bien sûr. Il y avait heureusement maintes façons de faire plaisir dans cet art subtil de l’amour. Voyons si les formes plantureuses Narths seraient au goût de l’enfant de l’amour.

Au point de rendez-vous, je saluais tout le monde, feignant deux verres dans le nez si tôt donc un déhanché léger mais aguicheur en prenant place aux côtés de Morwen qui semblait si sage que j’aurais voulu la récompenser. Cela attendrait sûrement.

- Alors, soeurett’. On attend l’reste d’la famille puis on décolle ? Ha ! Une blonde ! Bonne idée, tiens ! Hé, beau blond ! Une bière s’teuplait et promis, j’ai…

En minaudant, je sortis d’entre mes seins qui allaient presque sortir d’un décolleté absolument pas fait pour ce bonnet un orbe que je soufflai pour faire reluire avec ma manche et que je fis glisser sur la table vers le colosse à la moustache impeccable.

- …d’l’argent, finis-je en faisant un clin d’œil à Morwen.

Morn. Pourquoi Morn ? Et pourquoi Narthan ? Damon avançait au travers des rues de la ville calmement et le regard détaché. Pourtant en lui grondait son désamour du pays du feu. Il n'aimait pas la châleur de Narthan. Pourtant il ne se plaignait pas, il ne se plaignait jamais. A quoi bon. Et puis il était ici en mission. C'était capital. Habillé d'une simple chemise légère et d'un solide pantalon, il passait pour un mercenaire avec ses affaires et ses épées à son côté. Les cheveux collés à son front par la sueur et cachant légèrement le cache-oeil qui recouvrait son oeil mort, il regardait autour de lui comme s'il cherchait quelque chose. Un travail ou quoi que ce soit. Il était large d'épaules et les talons de ses bottes claquaient sur le sol mal pavé de certaines rues.

Il était venu en servant justement de mercenaire à une troupe de marchand. Ayant préféré laisser Gorynych derrière lui. Son frère dragon n'aimait pas les fortes chaleurs et, contrairement à ses compagnons du jour, ne pouvait pas se dissimuler contre lui. S'il avait vraiment besoin de lui il savait que le dragon de glace se déplacerait et apparaîterait en quelques coups d'ailes. Gorynych était très rapide, sans doute l'un des dragons les plus rapide de la guilde. Léger et agile il était loin d'être une brute épaisse comme d'autre.

Souriant à quelques ribaudes qui lui faisait de l'oeil il mit quelques mains aux fesses en promettant de venir les rejoindre plus tard s'il avait le temps. Il ne le ferait sans doute pas mais éventuellement s'ils devaient rester plus longtemps, il ne dirait pas non à une petite partie de jambe en l'air. Ce n'était pas comme s'il avait des attaches émotionnelles avec qui que ce soit. Il se fichait pas mal de savoir si les putains de Morn étaient parfois forcées d'en venir à de telles extrémités. Ca ne l'interressait pas. Ce n'était pas important à ses yeux. Il n'y pouvait rien, c'était ainsi.

La grande enseigne de la taverne se dessina et Damon eu un léger sourire avant de se diriger vers la porte. Candel. Cela faisait maintenant un an qu'il avait disparu. Etait-il gisant dans le fond d'une crevasse ? Il espérait que non. Pas seulement parce qu'il était le Grand Maître de leur guilde d'assassin mais aussi parce qu'il faisait parti des rares personnes à amuser Damon, réellement en tout cas. Poussant la porte il ne fit pas spécialement d'entrée remarquée comme ses camarades. S'essuyant le front il s'éventa sans se soucier du fait que sa chemise était largement entreouverte. A ce niveau là il était prêt à se déshabiller et se balader tout nu. Il n'aimait pas la chaleur. Mais ce n'était pas nouveau. Déjà tout petit Ryan lui courait après avec un pantalon à la main l'été. Souriant à ce souvenir, Damon aperçut soudain la chevelure flamboyante de Morwen. Arquant un sourcil à la ribaude à ses côtés il secoua la tête d'amusement et les rejoignit.

Sans aucun préavis il s'installa entre les deux et glissa ses bras autour de leur coup, se faisant tout d'un coup presque charmeur.

"Et bien mes chéries... la compagnie d'un honnête mercenaire vous ferait-elle plaisir," et se tournant vers ce qui était très certainement le troisième larron du groupe. "Combien du prend ma douce ?" demanda-t-il, joueur malgrés le fond de son regart plutôt lymphatique.

Peut-être arriveraient-ils à l'amuser un peu et à lui faire oublier cette maudite chaleur Narth.

- Si c’est pour faire plaisir à un joli minois comm’l’tien ? Toujours, frangine !

Mon déguisement eut l’effet escompté ! Prodigieux n’est-ce pas ? La meilleure façon de ne pas s’ennuyer est de toujours se réinventer. Oui, j’ai l’air farfelu à me lire mais il n’empêche que si mes propres camarades réagissent comme je l’espère, c’est la preuve que mes capacités sont utiles. Bien évidemment, je ne suis pas cruel, ma chère Morwen se renfrogna derechef et je ne pus que sourire sans trop de joie. Je savais que c’était mal de la tenter sachant qu’elle supporte mal la gent masculine. Ce que notre frère Damon ne comprit pas de suite et à sa demande, je me collai à lui en me déhanchant, souriante comme une catin trop pressée d’avoir droit à un beau client qui ne pouvait décemment pas lui échapper. Ainsi, ma hampe était clairement révélée au contact rapproché histoire de lui dévoiler mon identité sans éveiller de soupçons autour de nous.

- Pour toi, frangin, chuis tentée de t’faire c’que tu veux gratuitement…

Je gloussai comme une folle puis ma bière servie dans une choppe de bois, je fis mine de boire une lampée, en ne buvant qu’une gorgée et en faisant danser ma gorge déployée histoire de faire croire que je m’enivrai comme une brave femme de Morn qui se respectait.

Morwen était tendue. C’était compréhensible. J’étais moi-même très sérieux car il fallait que l’on trouve notre Maître au plus vite tant que la piste était encore chaude. J’essuyai la mousse de la bière acide avec la manche de ma robe en prenant le temps de remballer mes tétons roses qui menaçaient de déborder hors du décolleté ce qui avait le don d’émoustiller Morwen. Même si ces fruits n’étaient pas de moi, cela me faisait plaisir d’être dévoré par son regard malgré son refus premier. A ses directives, j’acquiesçai mollement et prit une autre gorgée de bière pour finalement quitter ma place et prendre le bras de Damon.

- Allons-y !

En suivant Morwen, je fus encore sollicité par les ivrognes de la taverne de fortune ce que j’accueillis par un énième gloussement et en prime, un rire porcin.

- Hey ! Chuis déjà prise et lui au moins est charmant et à du fric !

Satisfait de cette sortie, Morwen me lança d’un air boudeur mais toujours concentrée :

- Toi j'te hais. Maintenant j'ai envie de baiser. Mais plus tard, là on a du boulot.
- J’t’ai déjà dit qu’j’étais fière de toi ? Ben j’te l’dis encore une fois tiens !

Toujours dans mon personnage, je souris à Morwen, l’air sincère et repartit aussitôt dans mon déhanché et mon euphorie imbibé d’alcool simulé agrippé au bras du glacial mais Ô combien adorable Damon. Respecter son rôle à la lettre. Toujours.

Nous étions unis dans un professionnalisme et une exubérance au diapason de nos espérances dans les rues malfamées et charmantes de Morn l’éplorée.

Damon manqua de rire quand Morwen réagit au quart de tour. A la place il lui offrit un sourire amusé et un oeil rieur. S'il avait pu il lui aurait fait un clin d'oeil. Mais ça ne marchait plus maintenant. Pas avec un oeil en moins. L'ancienne soldat d'elite était parfois si facile à faire exploser. Ca l'amusait quand il n'avait personne d'autre à embêter. Elle lui egayait sa morne journée. Tout comme la donzelle à son autre côté. De ce côté là, il n'était pas interressé plus que ça par les femmes à la base, ni par les hommes. Sa sexualité allait au grés de ses envies du moment, il ne sauterait jamais sur la première venue, ça ne l'interressait pas tant que ça. Mais là, il fallait bien jouer le jeu.

"Tu sais ma grande... je suis plein de ressources," fit-il, le ton enjoleur, à Lucien alors qu'il collait ses parties intimes contre sa jambe. Imperturbable Damon. Là encore c'était presque frustrant de ne pas pouvoir faire de clin d'oeil. A la place, il alla coller sa main aux fesses de l'aîné du groupe et eut un rire un peu gras. "Si c'est gratuit... je dis pas non en tout cas," rajouta-t-il en regardant Morwen s'avaler sa bière d'un coup sec.

Aussi vite qu'il était arrivé, les voilà déjà repartis. Morwen n'avait aucune patience. Et c'était vrai, ils avaient beaucoup de choses à voir ensemble. La disparition de Candel n'avait que trop duré. Il était temps de s'y mettre sérieusement, il n'avait pas l'air prêt à revenir de lui-même.

Bras dessus bras dessous avec Lucienne il fit comme s'il la soutenait de trop d'alcool et avança vers la sortie, le regard impassible. Observant la véritable femme du groupe il eut un sourire cynique à son encontre alors que le métamorphe s'amlusait avec les poivrots.

"T'es sérieuse parce que t'es génée tout d'un coup ?" demanda-t-il, moqueur.

Mais Damon restait sérieux et une fois dehors son visage perdit ce petit sourire alors qu'il gardait son oeil sur les positions des gens alentours. Il était aussi temps qu'ils se mettent au travail. La tâche qui leur avait été confiée était rude. Et, mine de rien, il avait conscience d'être le plus jeune de la bande. Bien qu'expérimenté et étant considéré comme un des meilleurs membres de la guilde. Il était conscient qu'il avait encore beaucoup à apprendre.

Des boires et déboires, un lot quotidien dont jamais je ne me lasserai. Non, jamais. Entre Damon qui savait épouser mon jeu et réveiller ma hampe et Morwen épouser aussi bien mes formes que le manche de son nodachi, permettez-moi de dire que je suis une personne comblée. Ils ne sont pas mauvais, ni bons d’ailleurs, je suis leur comme ils sont miens et de ces petits hiatus de joie et de violence, j’espérais tellement retrouver notre Maître et lui dire que sa famille pouvait se targuer d’être unie même en se complaisant de la différence dans un membre unique comme de son but. Vous ne me croyez pas ? Je saurai vous convaincre avec le temps et les faits.

En laissant Morn derrière nous, ma très chère sœur qui avait réussi à continuer l’effet que m’avait procuré Damon c’est-à-dire à durcir complètement mon pédoncule et nous exposait son plan dont la destination était Carabas. Cela allait prendre du temps et j’avais aussi mes plans : suivre la trace de la Reine Hattusha. Depuis Carabas, j’allais pouvoir entrer en Waterfield et demander un visa en règle à la Tour Perlée jouant de mon statut de Wyrm. Pour l’instant, ça serait avec le passe d’un marchand Narth dont j’allais pouvoir prendre le visage et sa place. Un pauvre homme qui ne m’avait rien fait mais nécessaire pour notre grande cause. Il vivait à travers moi à présent. Combien de personnes ai-je tué pour cette raison ? Beaucoup. Cela devrait vous suffire comme réponse. Par déduction, vous savez que je peux être n’importe qui dans les Territoires et être en règle.

- Cela m’va parfait’ment, soeurette ! J’ai c’qu’il faut pour passer tranquille les frontières et j’te suis !

Il fallait aussi qu’en cours de route que l’on se débarrasse des montures. Si Morwen ne payait pas son ardoise dans un bouiboui qui ressemblait à un foyer amical, elle n’allait pas payer pour trois chameaux.

- On devra passer une nuit ensembles dans l'désert, j'devrai vous violer pour me venger de vos blagounettes à la con.
- Et qui t’dit que c’était des blagues ? Chuis sérieuse quand je dis que chuis fière ! Et pourquoi violer alors que l’attirance est partagée, hein ? Surtout que j’peux pas dire non à la famille mais en plus à une frangine qui n’a pas voulu qu’on m’touche la guibole...! répondit-je en laissant le choix à mes compagnons de continuer ma phrase dans leur esprit.

Souriant de toutes mes dents et partant dans un fou rire gras, je montai sur mon chameau avec précaution pour ne pas assommer Lamia qui serpentait autour de ma taille, gardant toute ma gratitude secrète rien que pour moi, disons que je reste généreux mais à voir son ton pivoine sur ses belles joues, cela m’étonnerait fort que ça lui plaise. Et puis, qui sait ? Je garderai cette petite révélation au frais pour plus tard. Chaque chose en son temps.

- En route, frangin ! La nuit va être tooooooooooorride ! m’exclamai-je à Damon qui avait récupéré son masque d’impassibilité.

Et comme un homme trop heureux de revoir une amante vue de jour, nous allâmes vers le désert de Firthan de nuit. La lune allait être l’œil voyeur de notre embrassade future sous le signe du pardon et de l’enseignement de la tendresse. Un viol ? Ha ah. Non, Morwen et Damon ne le savaient sans doute pas mais j’avais le sincère espoir de leur donner un peu du sens du prénom de ma sœur dans les Ténèbres. L’amour était un droit même pour la plus infâme des créatures. Et nous étions de beaux spécimens en termes de vices humains. Pour la vertu des petites gens comme vous, nourrissez-nous de votre haine et nous irons où la loi ne peut y poser un orteil et où la douceur pouvait être permise dans la cruauté et l’attachement des plus complets.