Une étrange silhouette traversait les couloirs de Lindorm. Une silhouette avachie, qui produisait un bien étrange bruit, entrecoupé d’éternuement étouffé. Une silhouette enroulée dans une épaisse couverture, en nage, les cheveux collé au front par la sueur et qui pourtant grelottait de froid. A vouloir jouer les héros sous la pluie avec Estefania, Maelen avait attrapé froid, et la fièvre était montée avec une rapidité fulgurante. Incapable de se réchauffer dans son lit, il s’était roulé en boule, avait eu la douce idée de rejoindre l’un de ses colocataires dans leurs lits, mais le souvenir fugace de sa nuit avec Ludwig le fit reculer. Il préféra s’enrouler dans sa couette, et comme une âme en peine il traversa l’académie.
Essoufflé en à peine trois pas, il mit du temps à descendre les marches pour rejoindre l’infirmerie. Le vent soufflait fort au dehors, la pluie tombait et lui grelottait. Toquant à la porte en bois, il n’obtint aucune réponse, et se dit qu’avec l’heure avancée, il devait sans doute n’y avoir personne. Glissant contre le mur, il resta là, haletant, la tête le tournant un peu, les membres faibles.

Il lui fallut une force incommensurable pour se relever et remonter les escaliers pour atteindre le premier étage. Sauf qu’au lieu de rejoindre le dortoir des garçons, il prit la direction de la chambre de la seule personne qu’il savait être capable de l’aider dans ces moments là. La seule personne qui ne lui dirait pas qu’il était faible, qui ne se moquerait pas, et prendrait soin de lui. Car après tout, cette personne avait toujours veillé sur lui quand il était petit. Il se souvenait de ses bouillies de riz, ou de polenta bien chaude, des linges sur son front, de l’odeur douce des herbes médicinales.

Comme un fantôme errant, il se traina jusqu’à la porte et toqua tout doucement, il attendit, et toqua de nouveau. La sueur coulait le long de son front, son corps entier tremblait, ses jambes fléchissaient à chaque instant et il les sentit se dérober sous lui à l’instant où la porte s’ouvrait.
Tombant dans les bras de Shaem, il le fixa à travers le brouillard de la fièvre et chuchota :

« Je…Je savais pas où aller… »

Essayant de lui sourire, il sentit son esprit divaguer légèrement, et ses dents claquèrent de plus belle.

Allongé sur son canapé, Shaem avait le regard perdu sur le plafond de son appartement, un livre était ouvert entre l'une de ses mains mais il reposait sur son torse. La lecture de son roman n'était pas parvenu à le distraire de l'inquiétude qui le tiraillait depuis qu'il avait preuve d'une bêtise digne d'un adolescent en rut. Par sa faute, la fiancé de Maelen avait découvert leur relation et même si elle leur avait juré de tenir sa langue, Shaem n'était pas rassuré pour autant.
Il avait observé la jeune femme à chaque fois qu'il l'avait croisé depuis et il n'avait pas reçu de convocation de la part du directeur. Elle semblait donc tenir parole. Mais le danger n'était pas totalement écarté et le Saabi restait nerveux. Il n'avait pas revu Maelen en tête-à-tête depuis cet incident, il l'avait juste croisé de loin à la cafétéria, mais ça ne leur avait pas redonné l'occasion de reparler de la situation.

Etouffant un bâillement, il dormait moins bien depuis quelques jours ce qui expliquait pourquoi il veillait encore à cette heure tardive de la nuit. Enfin il se décida à quitter son canapé abandonnant son livre sur la table basse. Debout, il s'étira un peu bougeant distraitement les jambes pour remettre en place l'ample pantalon qu'il portait.
Il prenait la direction de la petite chambre adjacente à la pièce principale de son appartement lorsque son attention fut soudainement attirée par quelques coups frappés à sa porte. Interdit à l'idée que quelqu'un puisse venir frappé à cette heure, il ne s'avança en direction de la porte qu'une fois que de nouveaux coups y furent frappés.

Et lorsqu'il ouvrit la porte, il ne s'attendait pas à recevoir son jeune élève entre ses bras. Il eut le réflexe de la rattraper avant qu'il ne tombe pliant légèrement les genoux pour assurer sa prise sous ses bras. Sa voix était faible alors qu'il lui parlait et il nota bien vite les symptômes de la maladie : son front humide, son corps trop chaud, ses dents qui claquaient ... et l'épaisse couette qu'il avait trainé derrière lui.

« Ça va aller »

Doucement, il écarta quelques mèches collées sur son front pour croiser son regard, puis il poussa sur ses bras pour le redresser sur ses jambes. Il se pencha ensuite rapidement, juste afin de pouvoir passer son second bras sous ses jambes et il le souleva tout contre lui.
Il avait bien trop grandi pour qu'il puisse le porter aussi facilement que lorsqu'il était enfant.
La couette à moitié coincée entre eux, il vérifia que le couloir qui menait à son appartement et ceux de certains de ses collègues était vide, puis il se recula pour refermer la porte avec le pied.
Son regard se posa brièvement sur son canapé, mais il prit la direction de sa chambre n'allumant pas la lumière, il se laissa glisser par sa mémoire et surtout la lumière qui parvenait de la pièce principale. Délicatement, il déposa son colis sur son lit avant de se redresser.

« Glisse-toi sous la couette, je reviens »

Il n'avait pas besoin d'être médecin pour savoir que l'escapade sous la pluie de Maelen avec sa fiancée devait être à l'origine de son état actuel et donc que le garçon avait du attraper un sacré rhume. Rapidement il s'activa dans la petite cuisine de son appartement faisant chauffer de l'eau tout en préparant une théière avec un mélange d'herbes dont il tenait la "recette" de sa mère.
Il laissa ainsi Maelen tout seul quelques minutes, jetant des coups d'œil fréquents en direction de la chambre puis il revint avec une tasse fumante et un verre d'eau.

« Depuis quand es-tu comme ça ? »

Cela faisait bien longtemps qu’il n’était pas tombé malade. Il se trouvait déjà suffisamment faible, mais si en plus la fièvre le terrassait, il n’allait pas faire long feu. Lui qui avait pourtant juré de se montrer fort. S’écroulant dans les bras de Shaem, il leva son visage vers lui, son front légèrement humide. Essayant de lui faire un sourire, il grelota et se fourra dans son giron, appréciant de ne plus devoir supporter le poids de son corps.
Son esprit divagua un peu, il ne remarqua même pas que c’était la première fois qu’il mettait un pied dans l’antre de son compagnon. Les yeux flous, il se sentit juste flotter, continuant de trembler, de claquer des dents. Sa main s’accrocha à la chemise du Saabi, et il posa sa tête contre son épaule pendant le très court trajet jusqu’à la chambre.

Non sans mal, il réussit ramper sur le lit, à avoir la force de soulever la couette pour se fourrer dans les draps du lit. L’odeur tout entière de Shaem le submergea et il poussa un léger soupir de bien être, sa tête se fourrant dans les oreillers moelleux. Délirant un peu, il se recroquevilla, son nez humant les épices et la fleur d’oranger.
Pendant un instant il se revit au Palais des Airs, allongé dans son lit, fixant le plafond alors que Shaem lui tenait la main, changeant son linge humide sur son front. Quand il rouvrit les yeux, il croisa le regard doré de son amant et lui fit un petit sourire.

Il ne discernait pas grand-chose, un peu perdu dans la fièvre. Il eu juste la force pour se redresser un peu et tendre les bras pour attraper la tasse chaude. La chaleur dans ses paumes le calma légèrement et il huma le fumet un peu médicinal. Cela lui rappelait tellement de chose…

Eternuant, il réussit à ne pas en mettre partout et baragouina :

« Je..je ne sais plus…Je n’étais pas bien pendant le dernier cours, je..je n’ai pas beaucoup mangé…J’ai été me coucher tout de suite… »

Avalant une gorgée brûlante, un frisson le secoua et il se mit à trembler fortement. Essayant de se calmer, il se força à boire quitte à se brûler un peu la langue.

« Je..je suis désolé de t’embêter… »

Baissant les yeux, il hoqueta légèrement, se retenant de pleurer. Il détestait être dans cet état, se sentir aussi faible, devoir compter autant sur Shaem. Il voulait absolument pouvoir prouver qu’il pouvait se débrouiller seul, que ses épaules étaient solides…Mais il se faisait tout le temps rattraper. Il n’aimait pas être malade, cela lui rappelait cette longue année ou désespéré par la fuite de Shaem, il avait sombré peu à peu dans la faiblesse la plus totale, se sous alimentant, ne pouvant rien faire de lui-même, devant supporter des soins quotidiens. La présence de Raphael à cette époque avait été d’une grande aide et il avait remonté la pente, difficilement, mais il y était parvenu.

Se forçant à finir la tasse malgré le goût âpre, il sentit sa tête se faire lourde et glissa de nouveau sur les oreillers. Sa main chercha celle de Shaem et il regarda avec ses grands yeux bleus un peu vitreux.

« Tu..tu restes avec moi ? »

La main chaude le calma légèrement et il se cramponna à elle. Ses doigts s’entrelacèrent avec les siens et il frissonna légèrement, grelotant de froid, transpirant de chaud…

Il aurait pu, il aurait même du, aller déranger l'infirmière dans ses appartements pour lui confier Maelen. Il s'agissait de la procédure à suivre, il n'y avait pas de raisons valables pour qu'un professeur accueille au sein de ses appartements un élève ... aussi malade soit il.
Mais une fois de plus, Shaem n'agissait pas logiquement puisqu'il s'agissait de Maelen. La situation actuelle lui rappelait les quelques fois où l'enfant dont il avait la charge était tombé malade au sein du palais. Et même si les meilleurs médecins avaient été disponibles pour l'aider à aller mieux le plus rapidement possible, c'était toujours Shaem que l'enfant avait réclamé à ses côtés et c'était le jeune esclave qui lui permettait de s'apaiser, de se reposer et de récupérer du mieux qu'il le pouvait.

Il était également bêtement heureux que Maelen soit venu lui demander de l'aide dans une telle situation, même si cela pouvait mettre en péril le secret de leur nouvelle relation. Peu lui importait, il allait l'aider à aller mieux et ça allait lui rappeler de doux souvenirs.
Il lui apporta donc une boisson chaude faite à partir d'herbes médicinales qui allaient faire tomber la fièvre et l'aider à lutter contre les microbes. Il écouta sa réponse, rapidement soulagé de savoir que le mal ne s'était pas déclaré bien plus tôt, il guérirait d'autant plus rapidement.

Tranquille, il le regarda boire sa tasse, une moue légèrement contrariée se peignait sur son visage lorsque Maelen s'excusa visiblement pas très loin de laisser échapper quelques larmes. Mais il se retint et continua à boire sa tasse. Shaem demeura silencieusement à ses côtés, assis sur le bord du lit, l'observant en se remémorant en même temps quelques souvenirs. Il le lui répondit qu'une fois qu'il eut terminé sa tasse et qu'il lui posa une nouvelle question tout en refermant ses doigts sur sa main.

« Bien sûr que je vais rester, surtout que tu ne m'embêtes pas » Il se pencha vers lui pour pouvoir ancrer rapidement son regard dans le sien « Je préfère te savoir ici que dans ton dortoir »

Et également à l'infirmerie, même si ça aurait été plus sage.
Il se pencha et déposa un baiser sur son front se redressant en fronçant légèrement les sourcils. Il était vraiment brûlant. Doucement, il lui prit la tasse vide des mains pour la déposer sur la petite table de chevet adjacente, à côté du verre d'eau, puis il se releva.

« Je reviens »

Il ne reprit pas la direction de la pièce principale, ouvrant une autre porte pour pénétrer dans la salle de bain adjacente. Il s'y afféra quelques instants faisant couler de l'eau avant de revenir avec une petite bassine qui contenait un peu d'eau et un linge, entre les mains. Il déposa le tout par terre aux pieds de la table de chevet et essora le linge avant de se redresser de le poser sur le front du garçon. Ça devrait aider à faire tomber la fièvre.
Il se rassit aux bords du lit et reprit la main de son compagnon entre la sienne. Il n'y appliqua pas de caresses, pas encore familier avec ce genre d'attentions vis-à-vis de son ancien "petit maître", mais il la tint doucement.

« Essaye de dormir Maelen, ça passera plus vite »

Pourquoi avait-il désespérément besoin de cette douceur que lui prodiguait Shaem ? De se sentir autant en sécurité, comme un petit garçon. Il avait vingt et un an. Pourtant, il ne pouvait s’empêcher de regarder Shaem avec ces yeux d’enfants, de sentir son cœur battre à tout rompre quand il sentait son regard sur lui. Lui qui voulait lui prouver combien il avait grandit, c’était aujourd’hui difficile. Si difficile.
Mais il y arriverait, et alors à ce moment là, peut être qu’ils pourraient…

Rougissant aux pensées qui lui venaient à l’esprit, il se cacha un peu dans les draps. Il délirait, c’était la maladie, oui sans doute.
Essayant de sourire quand Shaem le força à le regarder, il savoura le baiser sur son front et ces mots qui le réconfortèrent. Oui, il avait bien fait de venir. Ils avaient très peu de temps à eux deux, alors même malade il était prêt à tout pour passer quelques minutes en sa compagnie.

S’enfonçant dans les oreillers, il regarda la silhouette de son compagnon disparaître et revenir avec une bassine d’eau. Le linge humide lui fit un bien fou et la fraîcheur le fit soupirer de bien être.
Sa main dans celle de Shaem, il lutta férocement contre le sommeil, il fit dériver son regard sur le visage bien trop sérieux de celui qu’il aimait. Il tendit le bras pour frôler l’arrête de son nez, le bout de ses lèvres, pour toucher les longs cheveux foncés qui sentait si bon.
Son bras retomba, ses yeux se fermèrent et il secoua la tête pour ne pas s’endormir.

« Non je…Je veux rester avec toi.. »

Grelottant un peu, il inspira profondément pour calmer les soubresauts de la fièvre et le liquide chaud qu’il venait de boire le réchauffa un peu.

Entrecroisant ses doigts avec ceux de Shaem, il lui demanda d’une voix douce :

« Tu…Tu ne m’as jamais dis tout ce qu’il s’est passé…Quand tu es partis… »

Baissant un peu les yeux, il eu une légère quinte de toux et finit par se caller confortablement dans le lit.

« Raconte-moi…S’il te plaît… »

Lui faisant le regard du chiot battu, il papillonna des yeux et finit par sortir des draps pour se lover contre lui. Il se roula en boule, posant sa tête sur ses genoux, se recouvrant de l’épaisse couverture. Il trembla légèrement mais resta là, accroché à la main, voulant à tout prix profiter de ces quelques instants.

Il voyait bien que Maelen luttait pour ne pas s’endormir et pourtant lorsqu’il lui conseilla de prendre du repos, le jeune homme n’en fit qu’à sa tête … comme le petit garçon capricieux qu’il avait été.
Alors au lieu de l’énerver, cela lui tira un sourire teinté de mélancolie parce qu’il continuait à retrouver celui qu’il avait été malgré le fait qu’il avait grandi.
Et c’était bien ça qui le troublait et qui l’empêchait d’être vraiment « naturel » dans leur relation.

Mais ça ne semblait pas vraiment perturber Maelen qui lui posa une question qui le fit se tendre. Il serra les dents, les muscles de sa mâchoire se crispèrent et il soupira avant de tourner les yeux vers son compagnon.
Maelen avait du comprendre sa réticence puisqu’il lui fit ce regard auquel il avait toujours peiné à résister et il vint même se lover tout contre lui empêchant ainsi toute tentative de fuite. Il sentait sa chaleur à travers le pantalon qu’il portait ainsi qu’au niveau de leurs doigts enlacés et après quelques instants silencieux, il soupira signe que Maelen avait gagné la partie.

« Au final, ça n’a pas été bien compliqué. J’ai … je me suis retourné dans le bureau de ton père et il m’a suffit de l’assommer pour récupérer les clés des portes extérieures »

Bien entendu, il passerait sous silence ce que le père de Maelen avait eu pour intention de lui faire en l’emmenant dans son bureau. Même si l’homme était mort à présent et que Maelen n’avait pas eu une relation fusionnelle avec lui, il savait que le garçon tenait à son père, alors Shaem ne voulait pas être celui qui assombrirait un peu plus l’image de cet homme.
Et puis aujourd’hui encore … il avait honte. Honte d’avoir attendu que sa sœur se fasse déchirer le dos pour se rebeller, d’avoir attendu si longtemps pour s’opposer à ses caresses qui aujourd’hui encore lui donnait le haut de cœur.

« On connaissait tous les passages discrets pour éviter les gardes et il ne nous a pas fallu bien longtemps pour nous retrouver en ville »

Il passait également sous silence le fait qu’il avait porté sur son dos sa jeune sœur qui gémissait à chaque mouvement trop brusque de sa part. Bien entendu, il n’avait pas été prudent de déplacer sa sœur dans l’état dans lequel elle se trouvait, mais après la réaction que Shaem eut envers le Maître, ils n’auraient pas eu d’autres occasions.
Distraitement en parlant, il replaça le tissu sur le front de Maelen puis avec sa main de libre il joua avec ses longues mèches de cheveux blancs les faisant glisser entre ses doigts.

« On connaissait un peu de monde et on nous a aidé à quitter la ville rapidement … avant que ton père ne retrouve ses esprits »

Ses doigts s’immobilisèrent dans les longs cheveux et il rabaissa les yeux sur ceux de son compagnon. Son visage s’était un peu renfermé, il n’aimait pas se remémorer ce souvenir si douloureux. Il voyait encore le dos zébré de sa sœur, il entendait encore ses gémissements douloureux alors qu’il la portait sur son dos, l’affolement et l’inquiétude dans les yeux de sa mère.
Et l’hésitation qui l’avait paralysé de longues minutes sur le pas d’une des portes extérieures lorsqu’il s’était rendu compte qu’il laissait Maelen derrière lui. Quelque chose s’était déchiré en lui ce soir là lorsqu’il avait finalement cédé à la pression de la main de sa mère sur la sienne.

« Tu veux vraiment que l’on se remémore tout ça ? »

De longues nuits pleines de douleurs, de souffrance à sentir son cœur se serrer, à pleurer toutes les larmes de son corps car on lui avait arraché son meilleur ami, son premier amour, il en avait vécu des tonnes. Mais Shaem était enfin là, à lui, alors peu importe de le blesser, il voulait tout savoir de lui. Il ne voulait pas de chichi, il ne voulait pas le ménager par pur bonté d’âme. Il voulait être celui qui le comprendrait le mieux, il voulait pouvoir compter sur lui et que Shaem puisse aussi s’appuyer sur ses épaules. Il voulait lui faire comprendre qu’il n’était plus celui qu’il avait connu, le Saabi n’était juste pas là pour son propre bonheur. Non, Maelen voulait rendre Shaem heureux et il ferait tout pour ça.

Alors il l’écouta parler, se concentrant sur ses mots pour ne pas sombrer dans le sommeil. Il s’était battu avec son père et cela rendit Maelen un peu triste. Il aimait son père, il aimait Shaem mais il n’arrivait pas à pardonner à cet homme de l’avoir tant fait souffrir, d’avoir tout sa vie asservit d’autres personnes. Avec lui, il n’avait jamais vraiment fait preuve d’une grande rigueur, il se souvenait de ses colères, surtout concernant son vertige, mais il l’avait plus fourré dans les pattes de ses professeurs et esclaves qui s’étaient occupé de lui. Au final son caractère emporté avait réussir à venir à bout de nombreuses personnes et il avait toujours fait ce qui lui semblait juste sans tenir compte du protocole. On lui pardonnait tout, il était un Ortega.

Les mains dans ses cheveux le firent gémir doucement, se sentant terriblement bien. Il serra la main plus fort pour soutenir Shaem dans son récit et quand il lui posa la question, il tourna la tête dans sa direction :

« Je veux tout savoir de toi Shaem…Je ne veux aucun secrets ou non dit entre nous…Je n’ai pas décidé de te déclarer mon amour sur un coup de tête… »

Déposant un baiser sur le dos de sa main, il frotta son pouce contre sa peau et lui fit un sourire tendre : « Je sais que c’est dur pour toi, que ce ne sont pas des souvenirs positifs..mais…j’ai besoin de savoir, pour te protéger, pour te connaître… »

La tête lourde par la fièvre, il toussa un peu et Shaem changea son linge avec douceur. Pour changer un peu de sujet, il demanda : « Raconte moi comment tu as rencontré Arrad ? »

Le fixant, il continua de lui sourire et sans s’en rendre compte, il s’endormit au milieu du récit. Quand il rouvrit les yeux son corps tremblait de chaud. Ses cheveux étaient collés sur son front et pourtant ses dents claquaient. Il se redressa, la tête lui tournait, sa poitrine le compressait et ses yeux discernèrent à peine la silhouette de Shaem dans le fauteuil face au lit. Il se leva, secouer par les tremblements de la fièvre. Il s’appuya sur le mur pour rejoindre la salle de bain et alluma la lumière. Il passa avec difficulté son t-shirt noir qui lui servait de pijama par-dessus sa tête et son pantalon en soie tout aussi noir. Nu, il tâtonna pour tourner le robinet d’eau, les yeux un peu flous, les jambes en coton. Grimpant dans la baignoire, il se mit sous le jet d’eaux froide et cela le calma un peu, il poussa un soupire avant de trembler de plus belles, ses lèvres devenant bleues de froid.

L’instant était particulièrement agréable, si on mettait de côté le fait que Maelen était malade, mais l’humeur de Shaem se trouva un peu refroidie par la question de son compagnon. Certes ce n’était pas méchant, bien au contraire, il comprenait un peu les intentions du jeune homme, mais sa requête le replongeait dans des souvenirs qu’il ne préférait pas se remémorer.
Mais comme toujours, il fut bien incapable de résister à Maelen et à sa voix suppliante. Après tout, si ça lui permettait de s’endormir plus rapidement. Il lui fit donc le récit de leur départ prenant sur lui pour rester neutre s’interrompant finalement pour lui demander s’il souhaitait qu’il continue.

Il apprécia le contact un peu plus fort de sa main sur la sienne et la franchise dont Maelen fit preuve. Bien sûr, il était troublé par ses paroles, il ne pouvait pas en être autrement. Parce qu’il peinait encore un peu à voir Maelen comme le jeune homme plutôt mature qu’il était devenu, il peinait encore à croire à cet amour qu’il lui déclarait pourtant sans gêne et avec beaucoup de conviction.
Il manqua certainement de rougir lorsque le jeune homme lui fit part de son désir de tout connaître de lui et surtout de le protéger. Il masqua sa gêne en changeant le linge sur le front dans son compagnon s’efforçant de calmer les battements un peu plus rapide de son cœur.
Il n’avait pas pour habitude d’entendre de telles paroles. Après tout, c’était lui qui avait protégé Maelen tout au long de son enfance, c’était lui qui s’était également occupé de sa mère et de sa sœur. Il n’avait pas pour habitude de se reposer sur quelqu’un, si ce n’était sur Arrad, alors le fait que son ancien petit maître lui dise une telle chose lui semblait un peu surréaliste. Parce qu’il ne se sentait clairement pas capable à l’instant de demander la protection de son compagnon plus jeune que lui en cas de coup dur.
Ça lui semblait … inconcevable.

Il ne fut donc pas mécontent que Maelen change de sujet lui permettant ainsi de ne pas lui répondre et de chasser le trouble qui avait commencé à s’emparer de lui. Le nouveau sujet qu’il lui proposait, à savoir sa rencontre avec Arrad, était bien plus facile pour Shaem qui sourit avant de commencer son récit par leur arrivée en Lostrego.
Néanmoins il n’eut pas le temps d’aller bien loin dans son récit puisque la fatigue prit finalement le pas sur la curiosité de Maelen et le jeune homme s’endormir sur ses genoux. Silencieux, Shaem resta quelques instants à l’observer jouant distraitement avec les cheveux du jeune homme et ce fut finalement une quinte de toux du garçon qui le ramena au présent. Doucement pour ne pas le réveiller, il l’installa confortablement dans les oreillers changeant une nouvelle fois le linge sur son front avant de s’écarter du lit.

Il ne s’installa pas à ses côtés pour dormir se refusant cette première occasion de s’allonger aux côtés de son compagnon. Non pas qu’il avait peur d’attraper les microbes de Maelen, il s’en fichait un peu. Mais il ne se faisait surtout pas confiance !
Cela faisait déjà quelques semaines qu’il avait dévoilé à son tour ses sentiments à son compagnon et il était une personne fidèle. Depuis il n’avait pas été voir ailleurs, il avait refusé de revoir cet homme rencontré dans un bar de Laragon avec lequel il avait prit un peu de bon temps depuis la rentrée. Alors certes il n’était pas un animal, il n’avait pas besoin de le faire tous les jours, mais il avait tout de même des « besoins » … et il n’était clairement pas prêt à passer le cap avec Maelen. C’était encore bien trop difficile pour lui, il n’arrivait pas encore totalement à détacher l’image du petit garçon du visage du jeune homme avec lequel il était à présent en couple. Il prit donc ses précautions en allant chercher un fauteuil dans sa pièce commune pour venir s’y installer à quelques mètres du lit de manière à pouvoir garder une distance respectable entre eux tout en restant à proximité au cas où son état de santé ne s’améliore pas.

Installé dans son fauteuil, il tint peut-être une dizaine de minutes avant de sombrer rassuré par la respiration régulière de Maelen.
Ce fut difficilement qu’il se réveilla plus tard dans la nuit tiré péniblement des brumes du sommeil et de son rêve par le bruit de l’eau qui coulait dans la salle de bain adjacente. Prenant appui sur les bras du fauteuil, il se redressa le dos un peu douloureux à cause de la position qu’il avait prit et il lui fallut quelques instants pour reprendre pied avec le présent. Ses paupières battirent et il remarqua que Maelen avait quitté son lit … ce qui expliquait le bruit dans la salle de bain.
Passant une main sur ses yeux dans une tentative vaine de chasser le sommeil, il se leva et prit la direction de la salle de bain. En poussant la porte déjà entrouverte, il fut un instant aveuglé par la lumière trop claire de la salle de bain et il lui fallut quelques instants pour s’y habituer.

« Maelen ? »

Sa voix était encore légèrement rauque à cause du sommeil et il baissa sa main plissant les yeux en luttant pour s’adapter à la luminosité. Il était inquiet pour son compagnon. Pourquoi prenait-il une douche en plein milieu de la nuit alors qu’il était malade ?
Mais cette question fut complètement mise de côté lorsque le regard du Saabi tomba sur le corps nu de Maelen … qui n’avait plus rien du gamin qu’il avait parfois accompagné dans les salles de bain de la demeure de son enfance.
Son regard assombri glissa sur ses épaules, son dos bien dessiné, certainement grâce aux cours qu’il avait depuis le début de l’année, sa taille un peu fine … ses fesses qui lui donnèrent des pensées qui n’allèrent pas en s’arrangeant alors que ses yeux terminaient leur course sur ses longues jambes nerveuses. Sa peau était toujours aussi pâle que dans son souvenir et il s’interrogea s’il avait gardé sa douceur de peau d’enfant.
Une pensée qui lui fit l’effet d’une douche froide lui faisant brusquement baisser la main qu’il avait tendu dans sa direction et l’excitation qui montait sous la ceinture.


« Maelen, ça va ? »

Une légère rougeur s’était installée sur son visage à cause de ses mauvaises pensées.
Il fit un effort pour se ressaisir remarquant alors les lèvres bleues de son compagnon alors qu’il tournait enfin la tête dans sa direction. Mais qu’est-ce qu’il fabriquait ?
Faisant deux pas en avant, il tendit la main mais pas pour le toucher, juste pour sentir la température de l’eau qui était glaciale. Cela le fit gronder et il se rapprocha encore pour pouvoir couper l’eau.

« Bon sang Maelen, c’est glacial. Tu veux attraper la mort ou quoi ?! »

En temps normal, il l’aurait soulevé et pris contre lui pour le faire quitter la baignoire, mais son regard se posa un bref instant sur le torse du jeune homme et il se détourna de lui. Il fouilla dans le placard le plus proche pour en tirer une épaisse serviette qu’il déplia et déposa sur les épaules du garçon. Ça le recouvrait … mais pas encore assez.

Debout et tremblant, grelotant, il essayait tant bien que mal de faire partir cette fièvre qui lui donnait chaud et froid. Il n’entendit pas Shaem l’appeler, trop perdu dans le flou complet de sa grippe. Son corps avait changé depuis sont arrivé à Lindorm. Quatre mois à courir partout, à monter et descendre de dragon, à se prendre des roustes pendant les cours de combat rapproché, à voler avec Norn depuis que Tylendel avait débloqué sa phobie. Ils y allaient doucement, progressivement, mais peu à peu avec Norn, ils glissaient de plus en plus haut et cela le rendait inébranlable. Shaem avait beau toujours le regarder comme un gamin, il n’en avait pourtant plus le corps. Il restait capricieux, imprévisible et pouvait sauter du coq à l’âne comme dans sa jeunesse, mais il essayait de se tempérer, de mieux réfléchir.
L’arrivée d’Estefania dans sa vie lui avait progressivement fait comprendre qu’il ne pouvait pas s’enfoncer dans une boucle de caprices odieux, qu’il devait lever le menton, subir le protocole et jouer avec. Alors il faisait attention, à tout, à ses gestes, à ce qu’il disait, il avait presque l’impression de parfois jouer un rôle mais pour arriver à l’objectif qu’il s’était fixé, il devrait déjouer les règles d’Aéria tout en respectant les us et coutumes. Mais il ne fermerait pas les yeux, il ferait tout pour faire tomber sa cousine et prendre sa place au poste de Gouverneur d’Aéria quand il serait prêt. Abolir l’esclavage était le but pour lequel il vivait, c’était un bien grand rêve pour le petit dragonnier qu’il était, mais il se donnait les moyens d’y arriver. Avec Shaem et Estefania à ses côtés.

Parfois pourtant, comme ce soir, il régressait, mais cela le soulageait, de se reposer sur Shaem, de sourire et de parler de tout et de rien avec lui, de savourer ses baisers et de dire tout ce qui lui passait par la tête. Cette complicité, il ne l’avait pas encore acquise avec sa jeune fiancée, cela viendrait sans doute avec le temps. Il fallait être patient, elle aussi changeait, imperceptiblement.

Soudain, l’eau s’arrêta et le Ventus se tourna vers Shaem, remarquant enfin sa présence. Une épaisse serviette arriva sur sa tête et il rit doucement en se souvenant de son enfance. Il se frictionna les bras et enjamba la baignoire avec difficulté. Sa nudité la plus totale ne le gênait pas, il n’était pas très pudique en soi, et encore moins avec le Saabi. Grelotant, il sentit ses cheveux mouiller lui dégouliner le long du corps et rentra un peu la tête dans les épaules quand son compagnon haussa la voix. Il éternua et releva la tête pour le fixer :

« Désolé…J’avais trop chaud… »

S’avançant vers Shaem, il remarqua alors qu’il ne lui manquait qu’une bonne tête pour faire sa taille. Riant, complètement amorphe, il se mit sur la pointe des pieds pour voir si il atteignait sa taille. Puis finalement, il posa son front contre son épaule et baragouina :

« J’ai envie de dormiirr… »

S’affalant à moitié sur le jeune professeur, Maelen s’endormit contre lui.

Maelen est-il conscient, ne serait-ce qu'un minimum, de l'effet qu'il lui faisait ?
Shaem en doutait ou alors son compagnon avait bien plus grandi qu'il ne le pensait et qu'il savait déjà comment faire pour arriver à ses fins.
A ce moment précis, l'esprit du Saabi était sans dessus dessous. La frustration de ces dernières semaines - il n'était qu'un homme - les souvenirs encore trop vivaces de son compagnon enfant et le contraste avec le jeune homme qu'il avait à présent sous les yeux, autant de choses qui faisait perdre au professeur Nazarian son fragile self-control.

Il fallait dire aussi que Maelen ne lui facilitait clairement pas la tâche en se dévoilant ainsi devant lui tout en étant dans un état secondaire. Il émanait de lui une sensualité certaine, il avait un corps un peu plus fin que le sien mais un corps d'homme avec les formes qu'il fallait pour réveiller une chaleur bien familière dans les reins de Shaem. Si cette preuve irréfutable témoignait du passage de Maelen à l'âge adulte, son était actuel troublait encore le Saabi. Il était vulnérable, affaibli par la maladie qui l'avait poussé à se jeter sous l'eau froide de sa douche dans une vaine tentative de faire baisser la fièvre, et cet état réveillait l'instinct protecteur de l'ancien esclave. Cela lui rappelait les longues nuits qu'il avait passé à son chevet lorsqu'il était malade et qu'il était le seul capable de l'apaiser.
Un rappel encore douloureux qui l'empêchait de jouer correctement son rôle de petit ami et surtout d'amant auprès de celui qu'il avait élevé.

Refroidi légèrement par ses souvenirs, il ne put s'empêcher d'être un peu sec avec son compagnon l'engueulant à cause de la température de l'eau et donc du fait qu'il pouvait aggraver son cas en restant trop long sous un jet d'eau si froide. Maelen s'excusa légèrement en sortant de la baignoire puis se mit à rire plongeant Shaem dans la perplexité alors qu'il se hissait sur la pointe des pieds devant lui permettant ainsi au professeur de comprendre les pensées de son élève. Il soupira et se tendit lorsque le garçon combla la distance qui les séparait pour poser son front sur son épaule.
Il avait décidé bien grandi.
Et en quelques secondes, Maelen s'immobilisa et Shaem n'eut pas d'autres choix que de refermer ses bras autour de lui pour l'empêcher de tomber. Le jeune homme s'était endormi en un instant.

« Tu pouvais pas aller jusqu'au lit ... »

A croire qu'il était confortable.
Il soupira, puis vint la partie la plus difficile. Prenant garde de ne pas trop Maelen, il parvint à l'enrouler dans sa serviette avant de le prendre dans ses bras comme une mariée. Brève idée qui lui tira un sourire lui permettant d'oublier un instant qu'il n'avait qu'une mince serviette qui le séparait du corps si attirant de son jeune compagnon. Il ne retira cette dernière qu'une fois qu'il eut glisser Maelen sous l'épaisse couette. Le trajet et les manipulations ne l'avaient clairement pas aidé à calmer le désir coupable qu'il sentait animer son corps et ce fut après un bref baiser sur le front du garçon, qu'il alla s'absenter quelques instants.

A son retour, il ne se sentait pas encore vraiment mieux.
Il fallait vraiment qu'il fasse le point sur ses sentiments et qu'il parvienne à séparer le passé du présent au risque ce mauvais état d'esprit finisse par avoir des répercussions sur leur relation. Soupirant, il s'installa une nouvelle fois dans son fauteuil histoire de profiter du peu d'heures qu'ils leur restaient avant qu'ils ne débutent une nouvelle journée de cours.


Il fut réveillé quelques heures à peine plus tard par le jour qui provenait de la fenêtre de chambre dont il n'avait pas tiré les rideaux.
Bon sang, il n'avait clairement pas son quota de sommeil, mais de toute manière son dos lui faisait clairement savoir que ça n'avait pas été une bonne idée de dormir sur ce fauteuil. Jetant un coup d'œil à l'horloge, il vit qu'il avait une heure devant lui avant le début de son premier cours et il se fit donc violence pour se lever. Il se rapprocha du lit où se retrouvait Maelen chaudement emmitouflé sous la couette. Il sourit devant les traits détendus de son visage et fut rassuré en posant une main sur son front. La fièvre semblait être tombée.
Il se pencha au-dessus de lui, fermant brièvement les yeux en inspirant l'odeur de ses cheveux et il déposa un baiser à la place de sa main avant de se redresser.

Puis il sortit de la chambre pour regagner la cuisine et il se mit à préparer le petit déjeuner sur un plateau : du pain qu'il fit griller, du thé bien chaud, des fruits secs, un jus d'orange pressé, du yaourt. Il avait laissé la porte ouverte entre la chambre et la pièce de vie permettant ainsi que le bruit qu'il faisait le tire doucement du sommeil.
Puis son plateau en main, il regagna la chambre.

Douce attention qui lui rappelait un peu sa façon de faire lorsque Maelen était enfant, mais il s'agissait également d'une manière de se pardonner pour les mauvaises pensées qu'il avait pu avoir à l'égard de son compagnon.
Il allait lui falloir du temps pour qu'il parvienne à se débarrasser de cette culpabilité malsaine.

« Tu te sens mieux ? »

Ses souvenirs d’enfances avaient fait de Shaem un fantasme presque inatteignable, un être hors de sa portée qu’il avait toujours admiré avec un certain recul et une envie irréelle. Alors maintenant qu’il était en sa possession, Maelen avait presque l’impression d’avoir son atteint son but, il l’avait atteint pour tout dire. Alors plus rien ne pressait, il était certes un homme, mais ces journées éreintantes, ces prises de têtes avec Estefania l’épuisait. Après les cours, il faisait ses devoirs, du mieux qu’il pouvait, demandant parfois à Nath de l'aider, gardant un peu de distance avec lui depuis qu’il savait pour lui et Raphaël. Il n’avait pas vraiment apprécié de ne pas être dans la confidence et avait fait un caprice au bal. Nathanael savait pour son amour pour Shaem, pourquoi son meilleur ami lui avait-il cacher ça ? Enfin bref, il faisait ses devoirs, allait manger, se douchait et finissait immanquablement par s’endormir comme une pierre sur son lit. L’envie ne manquait pas, plusieurs fois il s’était dit qu’il serait peut être amusant de rejoindre Shaem dans ses appartements. De le taquiner pour le pousser dans ses retranchements. Maelen en était capable, il n’avait pas honte et il avait diablement envie de le faire.
Pourtant, une fois devant la porte, prêt à toquer, il faisait toujours demi tour. Il avait peur, peur que cela casse quelque chose entre eux, il ne savait pas vraiment trop quoi, mais il finissait toujours par tourner les talons. Et si Shaem voyait encore en lui un enfant, si il était dégoûté par son apparence ? Le Ventus ne voulait pas voir le visage de son amant avec une telle expression, il voulait lui prouver qu’il était un homme, mais c’était difficile pour Shaem et il le savait. Il lui avait fallu de longues semaines pour oser lui avouer son amour, alors pour passer au cap supérieur, cela allait être peut être encore plus long.
Alors Maelen avait fait pour une fois preuve de sagesse. Il n’avait rien précipité, il n’avait rien tenté, se contentant d’être là de temps en temps, de l’embrasser à la sauvette entre deux cours, de le fixer avec un amour infini. Il voulait lui montrer qu’il comptait plus que tout et pour ça, il était prêt à attendre.

Peut être se voilait-il aussi la face en se disant qu’il faisait cela pour Shaem, car cela le terrifiait aussi, il n’avait jamais été dans cette position, et même si il savait que son amant prendrait son temps, cela le terrifiait. Alors, pour le moment, il se contentait de ce qu’il avait, savourant chaque précieux moment, chaque frôlement de main qui l’électrisait, chaque baiser qui lui faisant trembler les jambes.

Quand il rouvrit les yeux le lendemain, ce fut une odeur de pain grillé qui lui agita l’estomac. Sa tête était encore lourde, sa bouche pâteuse et quand il se redressa dans le lit, un énorme épi sur la tête, il bailla à s’en décrocher la mâchoire, le corps encore faible de la fièvre de cette nuit. Remarquant qu’il était nu, il vira au rouge cramoisie et fut incapable de se souvenir de quoi que se soit. Paniquant, il leva ses yeux vers Shaem et ne pu que s’empourprer de plus belle.
Fixant ses mains qui tremblaient, il bafouilla :

« Je...oui, un peu... »

Torse nu, il resta assit sur le lit, fixant le plateau devant lui. Il avait beau se creuser la tête, rien ne lui revenait. Le trou noir le plus total. Il n’allait même pas se rappeler de leur première fois, il était si stupide.

Picorant en silence le plateau, il n’osa pas regarder Shaem. D’une voix timide, il demanda :

« On..on l’a fait..cette nuit ? Je..je ne me souviens plus... »

Honteux de ce qu’il venait de dire, il mordit dans une tartine et s’essuya la bouche avec sa main. Il ne savait vraiment plus où se mettre.

Un sourire amusé étira les lèvres de Shaem lorsqu'il pénétra dans la chambre avec son plateau retrouvant un Maelen encore un peu endormi, quelques mèches de cheveux rebelles et une rougeur sur les joues qu'il mit d'abord sur le compte de l'effet de la timidité à l'idée qu'ils se retrouvent tous les deux à prendre leur petit déjeuner ensemble.
Une scène qui n'avait pas eu lieu depuis de bien longues années.

Calmé cette nuit et à cause des pensées qui lui polluaient l'esprit, il déposa le plateau devant Maelen avant de se redresser détournant les yeux du torse nu de son compagnon. Au lieu de s'installer à ses côtés, il se dirigea d'abord vers son armoire pour en tirer un pull qu'il ramena au garçon.
Il n'eut néanmoins pas le temps de lui proposer puisqu'il fut arrêter à un mètre du lit par la question bredouillant de son compagnon. Ils furent bientôt assortis puisque le rouge monta également aux joues du Saabi qui se remémorait que trop bien la scène de cette nuit. Il ne se rappelait que trop bien de ce désir coupable qui lui avait embrasé les reins et qu'il avait contenu lorsque le garçon s'était endormi sur son épaule.

« Non! »

Réponse un peu brusque et lâchée automatiquement à l'annonce de cette possibilité qui aurait pu devenir réalité si Maelen n'avait pas été faible et si Shaem n'était pas encore rongé par leurs souvenirs en commun et l'ombre de leur ancienne relation.
Toussant légèrement pour s'éclaircir la gorge, il se rapprocha pour lui tendre le pull qu'il avait entre les mains. Et il déposa un sous-vêtement sur la table de chevet à proximité.

« Mets ça avant de faire une nouvelle poussée de fièvre » Gêné il le regarda attraper le vêtement avant de se rendre compte qu'il n'avait pas vraiment répondu à sa question « Tu as pris une douche cette nuit et tu t'es endormi dans la salle de bain. Je ne voulais pas te réveiller en te rhabillant »

Et surtout il n'avait pas voulu prendre le risque de tester son self-control alors qu'il était déjà à fleur de peau. Ses souvenirs le rendaient encore honteux d'avoir de telles pensées et envies à l'égard de son jeune compagnon, mais il savait qu'une fois que le désir était trop fort, cette honte pouvait être mise de côté. Et il ne voulait pas que ça se passe de cette façon.
Rapidement, il reprit son calme, la rougeur sur ses joues disparut et il glissa quelques mèches de cheveux derrière son oreille. Il alla ensuite s'installer au pied du lit, de l'autre côté du plateau se mettant à préparer une tartine, reprenant ses anciens réflexes. Cette activité lui permit de chasser de son esprit les images de cette nuit, de ce corps nu qu'il savait juste la couette à côté de lui et il lui tendit lorsqu'il eut terminé.

« Tu ne te souviens de rien ? »

Machinalement, il continua à lui préparer son petit déjeuner versant du thé dans les deux tasses présentes sur le plateau, puis une fois qu'il eut fini il se prépara un bol avec du yaourt et des fruits secs. Gestes mécaniques alors qu'il lui attendait la réponse de son compagnon.

La fièvre le faisait-il délirer encore ou Shaem venait de rougir monstrueusement gêné par sa question ? Maelen le fixa, presque incrédule, se sentant libéré par la réponse, puis finalement, il sourit tranquillement et mordit dans sa tartine avec un entrain certain. Bien, au moins il n’avait rien loupé et il avait réussit à déstabiliser le grand Shaem Nazarian sur des questions de sexualités.

Souriant en coin, avec ce petit air qui le rendait si insupportable, il posa son toast sur le plateau, enfilant le pull sous l’injonction de son amant. Son corps était engourdis par la fièvre, mais la tournure que prenait les événements, l’amusait énormément. Il venait de découvrir son compagnon pour la première fois gêné, et Maelen comptait bien en profiter.

Du coin des yeux, il suivit ses mouvements, ses gestes reprenant de vieux automatismes qu’eux seuls pouvaient avoir. Il attrapa la deuxième tartine bien que n’ayant plus trés faim, et but une gorgée de thé bien chaud, faisant un sourire innocent devant la question.

« Non...Tu me parlais de Arrad et je crois que je me suis endomi... »

Il ne se souvenait vraiment pas, il avait beau chercher, c’était le trou noir. Se foutant ouvertement de mettre des miettes dans le lit, il finit sa deuxième tartine et sirota son thé, s’enfonçant dans les oreillers, les cheveux complètement en vrac.

« Tu aurais pu me rhabiller Shaem, tu le faisait avant... » Un sourire sur le visage, il enfonça le clou en rajoutant : « Je ne pense pas être le seul homme que tu es vu nu de toute ta vie... »

Détournant les yeux pour paraître le plus innocent possible, il eu un léger rire et se pencha en avant à travers le lit, pour déposer un baiser sur les lèvres de son amant.

« Tu es si chou avec du rouge...juste là ! » Se foutant ouvertement de lui, il déposa un autre baiser sur chacune de ses joues et retomba sur le lit, sa tête lui tournant un peu. Le fixant avec une lueur de malice dans les yeux, il finit son thé tranquillement et attrapa le sous vêtement pour le mettre sous les draps.

« Tu as cours avec qui ce matin ? » Demanda t-il intrigué de savoir l’emploi du temps de son compagnon. Se remettant correctement sous la couette, il joua avec ses mèches blanches et commença à les tresser.

Bon sang, il venait de donner des armes à Maelen et il savait que c’était particulièrement dangereux. Il suffisait pour cela de rejeter un coup d’œil à l’air plus que satisfait que le jeune homme arborait à l’instant.
Bien heureusement, il ne fit pas son difficile et il se montra docile lorsqu’il lui demanda d’enfiler un pull permettant ainsi au Saabi de se concentrer plus facilement. Il reprit d’ailleurs contenance plus facilement en s’occupant les mains. En se trouvant aux côtés de son ancien petit maître, il reprenait ses habitudes, ses gestes maintes fois répétés et qu’il n’avait pas oubliés malgré les années. Il lui prépara son petit déjeuner en lui beurrant une tartine et en lui servant son thé. Il n’y avait pas d’attitude soumise dans la façon de faire du Saabi, juste des réflexes profondément ancré en lui, animé par l’attention surdéveloppée qui se réveillait en lui en présence de Maelen.

Il hocha distraitement la tête lorsque le jeune homme lui confirma qu’il ne se rappelait de rien et que ses derniers souvenirs correspondaient au moment où il s’était endormi la tête sur ses genoux.


Fugace pensée un peu honteuse dont il se blâma instantanément mentalement. Il était donc légèrement distrait portant une cuillère de son propre déjeuner à ses lèvres alors que Maelen lâcha sa petite bombe manquant à Shaem d’avaler sa bouchée de travers. Il ne fut pas capable de se retenir et il rougit à nouveau surtout lorsqu’il risqua un coup d’œil en direction du jeune homme qui se pencha à ce moment pour l’embrasser lui laissant le temps d’apercevoir son appétissant petit fessier.
A croire qu’il le cherchait.

Maelen enchaîna en se moquant de sa gêne et son expression sur son visage, l’embrassant sur les joues avant de se recacher sous la couette permettant à Shaem de reprendre sa respiration. Ses doigts s’étaient crispée autour de son bol la honte et le désir se livrant à nouveau une bataille acharnée au fond de lui. A ces deux émotions venait se mêler un soupçon de colère.


Il se força à prendre sur lui, ne souhaitant pas lui donner des armes supplémentaires pour se faire battre. Il ne reprit pas une bouchée de son déjeuner, tournant la tête dans sa direction lui répondant alors qu’il se tortillait sous la couette pour enfiler le sous-vêtement qu’il lui avait laissé.

« Non effectivement, tu n’es pas le seul homme que j’ai vu nu. Mais je ne suis pas du genre à en profiter lorsque mon partenaire est inconscient » Il ancra son regard dans lel sien et sans rougir, il ajouta « Je veux que tu sois en pleine possession de tes moyens et de tes pensées le jour où ça arrivera »

Il était parvenu à mettre sa gêne de côté pour lui parler clairement, voir même un peu fermement l’observant de son regard légèrement assombri par l’agacement et le désir qu’il avait pour lui. Alors certes, il n’était pas encore sûr et certain d’être capable de passer à la vitesse supérieure avec son compagnon, mais il avait sa fierté et il le lui fit comprendre.
Il détourna finalement les yeux, il avait dit ce qu’il avait à dire et il continua son déjeuner. Peu de temps après, Maelen l’interrogea sur sa journée à venir et Shaem releva la tête réfléchissant rapidement au jour où ils étaient.

« Cinquième année … ça va être sportif, surtout que les vacances approchent »

Et pourtant juste après lui avoir répondu, il étouffa un léger bâillement derrière sa main et sa cuillère. Au final la nuit avait été assez courte et il allait devoir se secouer pour donner un cours de qualité ce matin. Surtout que les cinquième années étaient ceux avec lesquels il pouvait aller le plus loin en les forçant à repousser leurs limites et celles de leur dragon.
Reposant son bol vide sur le plateau, il attrapa sa tasse et s’installa un peu plus confortablement en tailleur au pied du lit.

« Et toi ? Quel programme? »

Profiter de Shaem, il l’avait toujours fait. Dés l’instant où il avait su qu’il pourrait en tirer avantage, qu’il pourrait le faire tourner en bourrique, Maelen l’avait fait. Pourquoi ? Parce qu’à l’époque cela l’amusait, mais il était peut être un peu trop jeune pour aller loin, Shaem le rabrouant souvent, Maelen finissant souvent en pleur dans ses bras. Au final, il obtenait toujours ce qu’il voulait, surtout de son compagnon.

Capricieux ? Non, si peu...

Riant doucement, le taquinant alors que sa tête était lourde, il rencontra le regard assombri de Shaem et un frisson lui secoua l’échine. Incapable de soutenir son regard, il baissa les yeux et un léger sourire marqua ses traits. Bien, voilà, on y était presque, il arrivait déjà à faire en sorte que Shaem parle de la possiblité de ce qu’il pouvait se passer entre eux. Déjà le baiser au bal avait réussi à le faire sortir de sa zone de confort et de ses interrogations sur l’âge de Maelen. Non, il n’était plus un gamin de six ans. Il en avait vingt et un, et il savait comment ça fonctionnait.

Cachant son sourire en buvant du thé, il lui jeta un regard ou se mêla un rire et un soupçon de désir. Reposant sa tasse, il pencha la tête, ferma les yeux et lui fit un franc sourire, marqué par un pli taquin :

« Je ne parlais pas du fait que tu pouvais en profiter. Mais je suis content de voir que tu t’interesse à ce genre de chose... » Puis rouvrant les yeux, il s’accrocha à son regard et rajouta : « Ne t’inquiète pas, le jour où ça arrivera, je serais en pleine forme... »

Ecoutant la suite du programme de son amant, Maelen haussa les épaules dans le pul trop grand pour lui, et commença à natter ses cheveux.

« Je crois queje vais sécher les cours pratiques aujourd’hui. Je vais aller à l’infirmerie, et aprés c’est stratégie avec le professeur Ubieto...Ca va encore être long et il va encore nous lancer des craies à travers la figure... »

Poussant un soupir il s’enfonça dans les oreillers et jeta un coup d’oeil à son amant qui s’installait plus confortablement.
Retenant un éternuement, Maelen fit une petite grimace avant de craquer et de rejeter la couette du lit. Il s’avança à quatre pattes vers son amant, s’asseyant sur ses talons pour le fixer de ses grands yeux bleus. Il lui fit un sourire et plongea sur ses lèvres.

Il l’embrassa comme si sa vie en dépendait. Il allait lui montrer qui était le gamin. Il allait le lui faire payer...

Le petit sourire qui lui ornait les lèvres de Maelen, alors qu'il lui parlait des éventuelles ... relations intimes qu'ils pouvaient avoir dans un futur plus ou moins proche, n'augurait rien de bon. Shaem le connaissait trop bien pour ne pas savoir que Maelen se sentait en confiance et que ça n'augurait rien de bon pour lui. Il venait visiblement de lui fournir des armes que le jeune homme allait retourner contre lui le moment venu.
D'ailleurs, il ne se gêna pas pour lui répondre d'une manière taquine lorsqu'il fit l'effort de lui parler sérieusement de cette évolution.

Sentant qu'ils s'engageaient sur une pente trop dangereuse pour sa santé mentale et surtout pour son self control, il ne fut donc pas mécontent de changer de sujet et de parler de son programme de la matinée.
Il tiqua légèrement lorsque le jeune homme lui dit qu'il pensait sécher les cours pratiques pour aller à l'infirmerie, lui qui n'avait pratiquement pas séché de cours au cours de sa scolarité. Mais Maelen semblait encore fatigué de sa poussée de fièvre, alors Shaem ne répliqua pas l'écoutant parler du professeur qui allait avoir l'après-midi. Il avait entendu parler de lui, mais il n'avait pas encore eu l'occasion de le croiser.

« Tant que tu as du monde pour t'aider à rattraper les cours que tu vas louper. Fais attention de ne pas t'endormir durant son cours, si tu ne veux pas être sa cible »

Le baiser qu'il lui donna lui rappela un peu celui qu'il lui avait donné à l'infirmerie sous l'effet de la jalousie, il était tout aussi passionné voir même plus alors que Maelen, le fourbe, s'employait à l'attiser en faisant courir ses mains sur lui.

Un peu trop docile, Shaem se laissa manipuler, le corps fortement tendu alors qu'il se retenait du mieux qu'il le pouvait de réagir, surtout d'un point de vue anatomique. Il fit l'innocent en murmurant quelques mots à son oreille avant de capturer une nouvelle fois sa bouche lui donnant un baiser auquel Shaem répondit progressivement. Maelen était clairement décidé à jouer avec lui et son self control déjà durement sollicité au cours de la nuit ne lui permit pas d'y mettre fin en remettant le garçon à sa place. Il se retenait déjà depuis trop longtemps, alors il s'autorisa un instant de relâchement.
Grossière erreur.

« Maelen »

Et comme s'il avait été brûlé, Shaem se leva d'un bond son mouvement renversant une tasse sur le plateau, et il fut bientôt au pied du lit le regard colérique alors qu'il fixait son presque-amant sur son lit.

Passant une main dans ses cheveux, il s'éloigna un peu du lit.

« Finalement tu m'as l'air bien assez en forme pour ne pas avoir à sécher les cours, il vaut mieux que tu ailles te préparer ... je ne me suis pas en avance non plus »

Il l'observa encore brièvement et il s'écarta encore pour se diriger vers sa salle de bain s'arrêtant à l'embrasure de la porte pour ajouter quelques mots.

« On reparlera de tout ça plus tard »

Et il détourna les yeux pénétrant dans la salle de bain et poussant la porte derrière lui.
Il était bon pour une douche froide.

Oh, le vilain capricieux garnement qu’il était. Il voulait Shaem, impérieusement, il avait trop attendu. Il avait besoin de lui, de le voir craquer sous ses assauts. Grâce à lui, il se sentait fort, il dominait la situation, faisait du Saabi ce qu’il voulait. On ne brisait pas une enfance entière dévouée à son service en quelques années d'absence. Shaem avait été son unique univers pendant tant d’année, alors égoïstement il le voulait.
Il sentit le corps se tendre sous ses doigts, il sentit ses lèvres se faire hésitante sous les siennes. Mais Maelen aimait ça, il adorait le taquiner, le pousser dans ses retranchements pour le déchaîner. Car il savait que Shaem était un dragonnier de foudre, que derrière les calmes nuages, se cachait un caractère électrique, qui pouvait l’embraser à n’importe quel moment.

La chaleur tant convoité le quitta et un frisson de froid lui remonta le long de la colonne.

Abasourdi, il fixa le professeur, le corps encore alanguis et quand la phrase claqua dans l’air, il eut tout sauf envie de rire. Il osait, l’abandonner là, là comme ça. Pour qui se prenait –il ? Serrant les dents, il se redressa, ses mains tremblaient de froid, son corps de frustration. Sa tête lui tourna mais il s’en ficha.

La porte de la salle de bain se referma sans qu’il n’ai pu dire quoi que se soit et un sentiment de colère s’insinua dans son coeur. Rageur, il balança le plateau à travers la chambre, répandant le contenu sur le sol et sur les murs. La vaisselle se brisa mais il n’en eu cure. Il enfila son pijama avec lequel il était arrivé, puis ses chaussettes et traversa l’appartement pour claquer la porte d’entrée dans un geste violent.
Tournant la tête vers la droite et la gauche pour s’assurer qu’il n’y avait personne, il camoufla son bassin sous le grand pull de Shaem et remonta vers les dortoirs des élèves.

Si Shaem voulait jouer à ça, à le frustrer et à le traiter comme un gamin, il allait lui rendre au centuple. Car c’était mal connaître Maelen Ortega.


[Clos pour moi. Merci pour ce topic trop tooopp ! ]

Shaem referma la porte derrière lui puis s'y adossa en soupirant presque douloureusement.
Bon sang, il n'avait plus aucun doute, Maelen avait grandi.
Enfin presque puisqu'il entendit bientôt le plateau voler dans la pièce ainsi que son contenu.

La porte de son appartement claqua peu après et Shaem ferma les yeux le dos appuyé contre celle de la salle de bain. Il porta une main à son visage pressant l'arête de son nez entre son pouce et son index.
Derrière ses paupières clauses, les flashs des cinq dernière minutes se superposaient avec les souvenirs qu'il avait de son "petit maître" et le désir demeurait au creux de ses reins, preuve criante de l'évolution de ses sentiments à l'égard de Maelen.

Néanmoins, il ne regrettait pas, un peu quand même, d'avoir interrompu ce qui venait de se passer. Pour le bien de leur relation, il ne pouvait pas laisser Maelen le mener par le bout du nez et clairement le moment était mal choisi pour leur première fois ensemble.
Maelen était encore fiévreux, ils avaient tous les deux cours dans moins d'une heure, et ... vu le désir qu'il avait pu lui, il n'était sûr et certain qu'il ait été capable de rester doux.

Les choses évoluaient entre eux, c'était indéniable.
Alors ils finiraient par passer ce cap, dans plus un moins de temps, mais une fois qu'ils seront prêts tous les deux.
Prenant une impulsion, Shaem se décolla de la porte et pesta en se débarrassant de son pantalon. Définitivement, il était bon pour une douche froide.

Maelen lui en faisait vraiment voir de toutes les couleurs.

[Clos pour moi également. J'ai adoré !! Vivement la suite ]