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Inevitabilis.

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Assassins
+ Date d'inscription : 04/09/2014
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+ Âge du Personnage : 27 ans.
+ Poste occupé : Assassin de la Main, criminelle de guerre recherchée.
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Morwen O'Shanahan
Morwen O'Shanahan
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Message Inevitabilis. I_icon_minitimeLun 20 Oct - 14:52

Inevitabilis. 141020021948996087

    Tout son corps lui faisait mal, mais c'était une souffrance bienvenue: celle qui nous rappelle que nous sommes vivant même si pour Morwen cela ne tenait pas plus de la bénédiction que de la malédiction. Elle avait difficilement ouvert les yeux sur un plafond de roche sombre qu'elle reconnu après quelques minutes d'effort cognitifs comme étant le refuge des assassins de la Main du Jugement. Il faisait si sombre... ses yeux roulèrent un instant ans ses orbites et elle chercha à se lever sans arriver à esquisser le moindre mouvement; ne plus commander à son propre corps, quelle sensation effrayante. La jeune femme avait l'impression d'avoir un immense poids sur la poitrine, respirant difficilement en sifflant par le thorax d’une étrange manière. Surement plusieurs côtes cassées. Elle avait l'impression que tout son corps avait été brisé sous le marteau de ronces de son adversaire. C'était bien le cas. Et l'inactivité la rendrait folle, elle le savait, ignorant depuis combien de temps elle avait sombré dans l'inconscience. Des heures, des jours, des semaines? La douleur derrière ses yeux était intolérable, comme si ces derniers allaient sortir de leurs orbites et exploser. Elle avait si mal, et se sentait si bien à la fois.

    Derrière ses paupières closes, le regard déformé par la haine de l'ancien capitaine Bryne O'Cuinn. Son attention uniquement pour elle. Bryne l'avait enfin vue, remarquée. Bryne l'avait enfin estimée. Morwen se sentait étrangement légère et lourde à la fois, comme satisfaite de son sort en comprenant aujourd'hui, et aujourd'hui enfin, le poids qu'elle venait de se mettre sur le dos. Aucun baiser brûlant, d'homme ou de femme, ne rivaliserait jamais avec celui qui lui avait emporté une partie de sa lèvre inférieure. Personne, jamais. Les indécents souvenirs qu'elle avaient du trio qu'elle avait formé avec Lucien et Damon dans ses premiers sangs lui revinrent en tête. Plus loin que les instincts primaires, cette folie allait la plonger encore plus loin dans la démence maintenant qu'on lui avait appris des gestes inconnus, des ressentis qu'elle n'avait jamais éprouvé. De la tendresse parmi la licence; de la douceur par delà l'envie sauvage. Peut-être avait-on planté en elle des graines qui n'auraient jamais du l'être et qui ne donnerait jamais aucun fruit. La rousse ne savait pas; elle avait bien trop mal pour se perdre en métaphysique.

    Dormir lui semblait la seule chose qu'elle puisse réellement faire, appréciant de se torturer l'esprit en repassant dans sa tête son affrontement avec Bryne. Trois longues années pour finir écrasée comme une crêpe, et elle n'en regrettait pas une seconde. Trois longues années à attendre de pouvoir revoir cette femme qui hantait chacune de ses penses, chacune de ses mauvaises actions, chacun de ses pas. Trois ans à l'espérer, à imaginer sa présence et la consécration que sa Némésis aurait pu lui offrir aurait été la conclusion logique de ce sanglant voyage. Morwen avait jouit de la souffrance et de l'humiliation de Bryne, mais elle restait définitivement creuse. Que fallait-il donc pour qu'elle se sente bien? Pour qu'elle se sente libre? La Kevii comprit brutalement que jamais elle ne se sentirait bien: qu'elle tue Bryne, qu'elle l'abuse, qu'elle la découpe en morceaux... jamais, jamais elle ne sortait de son esprit. Cela ne changerait jamais; surement la mort de Bryne signerait-elle la sienne par la même occasion, perdant ainsi son unique motivation dans la vie. Se comprenant seule dans sa chambre, ce constat la rendit incroyablement malheureuse et elle ferma brusquement les yeux, cherchant à faire avorter des larmes qui débordèrent pourtant en cascades inarrêtables de ses yeux épuisés. Pourquoi fallait-il que cette maudite femme dirige ainsi ses pensées? Elle la haïssait tant, aurait voulu la voir morte. Et pourtant, chaque fois que Morwen essayait de tuer Bryne, elle se tuait un peu. Petit à petit.

    Même dormir ne la reposerait pas, et pourtant la rousse se perdit dans le sommeil puisqu'elle n'y tenait plus. Son esprit engourdi erra sur la dernière image que Bryne lui avait laissé, celle de sa bouche contre la sienne, ses dents dans sa chair. Comment ne pas trouver fade à présent les autres baisers, puisqu'on lui avait donné une telle ambroisie? Dans chaque femme qu'elle molestait, elle cherchait à y retrouver Bryne O'Cuinn; comme cela lui semblait idiot à présent. Personne ne pourrait se substituer à son ancien capitaine. Personne. Et ces pathétiques substituts ne la faisait que tourner en rond. Non pas qu'elle sentent des remords, ce n'était pas son genre: ces femmes étaient mortes parce qu'elle les avait tués; c'était la vérité. Elle avait maintes fois fait ces gestes de mort; maintes et maintes fois. Un assassin sait faire ça. Un assassin n'a pas de remords. Mais elle avait des regrets. Plein. Ils l'empêchaient de vivre.

    Un jour, Morwen avait débarqué dans une boutique d'antiquité où un vieillard avait cherché à lui montrer sa collection d'objets étranges. Surement était-il comme elle, seul au monde, et voulait-il partager quelque chose. Elle s'en était fiché, l'ayant laissé palabré seul pendant qu'elle avait regardé autour d'elle sans grand intérêt. Il lui avait parlé de rêves et de désir; un objet qui exauçait des souhaits. Des foutaises de vieux gâteux. Elle même avait une foule de désirs -incontrôlables pour la plupart- mais aucun rêve et aucun souhait. Finalement lassé, elle avait tué le vieillard en lui éclatant la tête contre son comptoir; c'était facile de tuer pour elle. Elle avait tué sa fille dans l'arrière boutique et ressortant de la pièce, avait volé ce petit œuf. Un œuf de dragon qui valait selon le veux des milliards d'orbes. Il portait bonheur; il réalisait un souhait ardemment désiré. Des conneries. Rien ne saurait exaucer les vœux. Et elle n'en avait aucun. Morwen avait quitté l'échoppe dans une certaine léthargie. A cette époque elle n'était qu'une meurtrière sauvage sans le moindre but qui refusait d'écouter les conseils du doyen Haalu et ne cherchait qu'à satisfaire le vide de son existence en massacrant ceux qui l'agaçaient. Un œuf de dragon qui offre un vœu: des milliards d'orbes pour des conneries de gosses.

    Il faisait si froid; elle tremblait sous sa couverture tout en souffrant durant les mouvements involontaires. L'odeur de son propre sang lui montait à la tête et l'empêchait de dormir, se sentant à la fois brisée et poisseuse: ses bandages étaient affreusement gorgés de sang. La jeune femme respirait part petits à-coups, par la bouche; son nez était salement cassé sous les bandages. Sa gorge était, tout comme ses lèvres exploses, desséchée et elle souffrit en déglutissant. Elle avait volé le premier baiser de Bryne; elle l'avait traversé de part en part avec son arme, l'avait rabaissée, humiliée, cherché à obtenir la mort de ses mains. La dernière chose n'avait pas marché mais avait imprimé au fer rouge dans l'esprit de la Kevii quelque chose de terrible, résonnant avec la tendresse que Lucien lui avait appris à la hâte entre ses coups de sang de Damon, dans la tente au fond du désert. Une impression qu'elle ne connaissait pas. Un sentiment, quelque chose. Un truc absolument effrayant qui la faisait se sentir complètement vide et creuse.

    Lorsque la porte de la chambre crissa, Morwen ne put regarder qui entra mais ses yeux se dirigèrent par réflexe en sa direction même sis a tête ne pouvait se soulever. Elle aurait eu envie de parler mais aucun son ne sortit de sa bouche et elle se contenta d'un soupir suivit d'une quinte de toux. Ses larmes brulaient ses plaies sur son visage creusé.
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Message Inevitabilis. I_icon_minitimeLun 20 Oct - 16:02

- Merci de l’avoir amenée saine et sauve…

Le Doyen Haalu, l’ermite à la canne qui savait resplendir de sagesse dans nos quartiers aux murs aussi noirs que notre fratrie. J’avais tellement envie de lui ressembler et sa fâcheuse habitude à penser aux autres plutôt qu’à lui-même me confortait dans le fait que j’étais bien parti dans mon entreprise. Tout aussi partagé que moi entre le rire fatigué et les pleurs, nous nous attelâmes à la récupération de la jeune Sœur qui était dans une chambre aussi nue qu’elle.

- Je vous en prie, Doyen. Ce fut plus facile que je ne l’avais espéré.
- Vraiment ?
- Au matin, les gardes avaient su qu’il y avait une gradée en permission et ils avaient pensé qu’elle ferait son devoir même en vacances et ont donc préféré patrouiller dans d’autres azimuts de l’île. Autant dire que j’avais la voie royale pour partir comme Morwen l’avait empruntée pour se battre…
- Quelle gradée ?
- Le Lieutenant des Comètes de Feu qui apparemment a oublié le visage de son père.


Et pour une fois, je n’usais pas d’ironie. Un dicton roroa disait que celui qui oublie le visage de son père était voué à ne plus en être un au-delà du statut de paria. Une formule alambiquée qui signifiait qu’un Roroa oubliant que le toit qui l’avait vu naître et le verrait périr qui était le Père Ciel perdait l’essence de son existence : celui d’être nomade. Que j’adore la philosophie roroa, si pure, totalement l’opposé de mon être. Un tant soit peu, j’essayais de m’abreuver d’elle pour espérer devenir quelqu’un de meilleur pour enfin offrir un peu plus de ma personne sans honte, ni remords.

- Voyons le bon côté des choses : la bêtise des gradés sert nos intérêts.
- Tu dois absolument rester prudent, Luciano.
- Doyen, j’aurais cru à vos paroles si seulement je savais qu’on ne peut abreuver de sagesse les idiots qui se pensent frappés de surdité car soyons sérieux, les plus intelligents sont soit en train de voir leur destin en marche ou ici-même.


Encore une fois, aucune ironie. Simples faits écrasant un peu plus la montagne devenu notre toit. De toutes façons, j’avais mieux à faire car quitte à ce que des « membres de l’armée » fassent joujoux de leur côté, ils m’avaient permis d’arracher rapidement ma chère Sœur loin du champ de bataille que jamais ces gens ne frôleraient.

Et si vous êtes persuadés que j’ai tort, prouvez-le-moi, car jusqu’à l’absence de preuves, vous me pousser à me barboter dans vos propres excréments que vous appelez « complaisance ».

Approchez et venez voir de plus près le visage du mot « conséquence ». Ne tournez pas la tête car je le saurai.

Ainsi vêtu de l’habit noir, observant mon respect et mon amour pour ma famille, j’allai vers l’enfant de l’amour avec en main une bassine d’eau chaude, un vêtement propre noir si besoin et une décoction faite par mes soins. Elle n’allait pas aimer rester en place ainsi et une transformation s’imposait. Via un entraînement serait parfait mais un corps strié de souffrances et de plaies, la paix s’imposait pour l’aider à se relever.

En guise d’introduction, les pieds nus tout comme le reste de mon corps sous la toge noire, j’entrai dans la chambre en cherchant la bougie afin d’éclairer un peu cette allégorie de l’esprit de ma Sœur meurtrie. Je posai la bassine au pied du lit, la potion aussi et délicatement, je m’assis près d’elle ne lui laissant que mon dos et ma crinière blonde de lostreg comme objets de contemplation. Aucun mot n’allait pouvoir réussir à la tirer de là, pas un chant, pas une danse.

Cette enfant avait puisé en moi dans des eaux que je n’avais pas reconnu, que j’essayais d’y mettre la main dessus. Rien. Un mur blanc comme mon nom. Une saturation de couleurs qui avait le don de m’énerver. Et pourtant, j’avais besoin de lui montrer ma reconnaissance, ma tendresse, ces marques d’affection qui la rebutaient autant que le corps d’un homme.

Je m’étais jamais autant senti homme qu’à ses côtés.

J’avais expérimenté mon premier amour avec notre Maître et maintenant ce qui s’approchait comme un cap de plus de ma propre virilité. Aucun rapport avec ce qui se cachait sous les plis de ma robe mais sur un nœud de chair et de sang que je remplaçais parfois par un rouage. Simple, méthodique, il ne peut aller que vers l’avant dans un délicieux bruit métallique et froid.

Une simple cadence que Morwen avait su fêler d’un coup sec.

Et j’en avais tiré quoi ?

Une reconnaissance éternelle.
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Assassins
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Message Inevitabilis. I_icon_minitimeLun 20 Oct - 18:23

Inevitabilis. 141020021948996087

    Elle qui avait été si plantureuse n'était que l'ombre inerte d'elle-même, le corps osseux ayant consommé sa propre graisse dans une guérison cannibale. Elle n'était depuis tout ce temps qu'un corps immobile au fond de son lit, muet à l'exception de quelques délires en sourdine où elle semblait appeler quelqu'un qui ne viendrait jamais. Multiplement brisée par son adversaire bien qu'elle ne fut pas en reste, Morwen guérissait lentement mais surement: son métabolisme avait toujours été la chose dont elle était la plus fière, vigoureux et fort. Elle était capable d'encaisser bien des coups, des collisions et des plaies avant de sombrer mais le combat avec Bryne avait été plus que dantesque, la laissant aux portes de la mort qu'avait refermé Lucien avant que cette dernière ne la happe pour la conduire auprès de son grand-père. Auprès de toutes ses victimes aussi. Mais l'heure ne venait pas pour les individus de son genre, de son espèce: ceux qui sentent la mort, qui s'en embaument et s'en gavent. La rousse avait décidé de quand et comment le sortirait de la vie, mais le trépas l'avait trompé. Lucien l'avait sauvé d'une mort certaine, mais elle ne le savait pas.

    Plongée dans un vague sommeil, Morwen ne fit pas attention à la personne qui s'assit sur le bord de son lit, trop évasive pour parvenir à se focaliser sur un détail; son visage bandé ne laissait qu'un œil valide et sa bouche tuméfiée, énorme, mordue aux sangs dont les commissures s’imprégnaient du sang qu'elle toussait. Elle frémit un peu dans son sommeil, babillant des sornettes incompréhensibles, de sombres incantations. Seuls ses doigts bougeaient normalement, s'agitant comme pour saisir des choses qui n'existaient pas. Et tandis que le blond préparait de quoi faire une toilette à la Kevii, cette dernière eut un spasmes dans sa torpeur, née d'un cauchemar visiblement. Elle poussa un sanglot, puis un cri et parvint à ramener ses jambes vers son torse, roulant sur le dos pour s'empêtrer dans son drap et tomber au sol, en plein sur le dos; un cri de douleur suivit tandis qu'elle reprit connaissance, réveillé pour une souffrance intolérable. La jeune femme roula pour se mettre ventre au sol, entre le sommeil et l'éveil: la souffrance la faisait délirer.

    "Ah... a... a... ller... d-oit... B... br...", elle se mit à ramper pitoyablement au sol, "... B... b... Br... aller... Bryne...a... a-aller... b... "

    Dans ses délires, Morwen ne s'éveillait qu'à moitié: le choc avec le sol l'avait réveillé puis portée aux portes de l'évanouissement, dans un état second. Son corps ne se mouvait plus que par un formidable instinct de conservation, une détermination au delà de l'état conscient qui la poussait à rejoindre désespérément le champ de bataille où se trouvaient ses derniers souvenirs troublés.

    Il fallait continuer le combat. C'était une lutte à mort; il fallait continuer jusqu'à la fin.
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Message Inevitabilis. I_icon_minitimeMer 22 Oct - 16:41

Tu l’as encore fait. Saleté de Sadalsuud. Tu ne peux t’en empêcher.

Elle avait raison. J’avais encore commis quelque chose d’horrible et de délicieux à la fois. J’ignorais encore de quoi était faite ma culpabilité mais elle était comme une goutte de sang pur sur la neige immaculée et froide. J’étais comme un idiot à regarder cette tâche s’oxydant au contact de l’air en laissant la persistance rétinienne s’installer pour être sûr de ne pas oublier et mes engrenages prendre le large, au loin, au-delà de ce mur blanc. Que je le haïssais. Que je me haïssais. Oui, ce qui la tuait était sa propre rage, cette Bryne qui avait réussi à mettre en charpie son cœur comme son corps et pourtant qu’est-ce qui me différenciait de cette femme-ronce ? A part des rondeurs ? Le fait que sa famille s’était fait une place dans la noblesse ? Le fait que ma terre était opposée à la sienne ?

J’avais envie de pleurer et de rire à la fois car avec tout l’amour que j’avais pour Morwen, j’étais incapable de haïr sa chère et cruelle Nemesis. J’aurais donné un bras pour remonter le temps et aider la Roroa à la sauver pour donner une raison au cœur de ma Sœur de continuer sa chasse à l’adrénaline. De toute façon, j’allais m’arranger pour savoir son sort d’une manière comme d’une autre. Il fallait que je retourne à Laragon dans pas longtemps pour ne point éveiller les soupçons de Mira qui a contrario de son homologue moitié Kevii et même avec un lien amical trouvant ses racines dans mon adolescence restait un esprit fin dans un sabre gardé par une main sûre. Autant ne pas lui donner des raisons de viser ma carotide par la pointe de son épée.

Pour l’instant, j’étais condamné à apprécier les conséquences de mes actes dans la fièvre de la folie qui gagnait le corps devenu aussi anguleux que le mien. Allait-elle me pardonner pour l’avoir transformée physiquement en quelque chose qu’elle détestait ? Etais-je le seul à être blâmé ? Non. Cependant, comme tout Homo Sapiens Sapiens qui se respectait, dès que l’empathie apportait son lot de souffrances, je remontais aussitôt dans l’arbre où l’évolution m’en avait chassé pour lécher mes propres plaies. Stupide égoïste simiesque.

Basta ! Elle seule comptait. Que ce mur explose ou que mes plaies suppurent.

Rapidement, je la rattrapai, la pris dans mes bras sachant qu’elle allait sans doute me blesser ou m’arracher une mèche ou deux de mes cheveux, j’en avais que faire.

- Morwen, ma Sœur. Tu es loin de la plage. Sois sage, tu dois guérir sinon tu ne parviendras à rien et certainement pas vers Bryne.

Quel rapace j’étais, je m’écoutais parfois ? Qu’allais-je bien faire avec mes promesses et des baisers constellant son front trempé de sueur et de commotions ? Je comprenais mieux sa haine des hommes, juste bons à faire mal avec ou sans préméditation et ne savoir que faire quand une femme souffre.

Je la tenais pour qu’elle ne sombre pas, je lui parlais encore et encore juste pour qu’elle reconnaisse ma voix. Je n’allais pas te demander ton pardon car je ne le mérite pas.

Seule toi compte en cet instant.
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Message Inevitabilis. I_icon_minitimeMer 22 Oct - 18:54

Inevitabilis. 141020021948996087

    La chaleur d'autres bras l'enveloppait doucement tandis que Morwen eut le loisir de reprendre ses esprits. Bien trop faible pour s'opposer à quoi que ce soit, elle reconnu enfin la silhouette de Lucien qui surplombait la sienne, la tenant contre lui. En temps normal, la jeune femme l'aurait surement repoussé, invectivé et agressé. Mais elle n'avait la force de rien présentement, même pas de penser. Elle tenta de redresser un peu la tête pour mieux le voir de son œil valide au travers des bandages, embué de larmes et tout vitreux. La sensation de ne pouvoir rien faire, de ne pouvoir ni agir ni communiquer la rendait folle de rage mais il n'y avait que de la douleur sur son visage ravagé, strié de contusions, de griffures, de croutes et de bleus. Entre les bras de Lucien, la rousse était petite et faible, comme elle n'aurait jamais voulu. Elle tremblait; elle avait faim, elle avait froid, elle voulait savoir où était Bryne. Elle manquait de tout.

    Les propos du Lostreg lui parvient comme dans une sourdine, comme de très loin. Être sage... elle ne trembla plus, déjà épuisée, les muscles commençant à dangereusement se raidir en vue d'une crise de tétanie. Et les baisers de Lucien lui parvinrent d’encore plus loin sans qu'elle ne s'y oppose, ne comprenant qu'à moitié ce qu'il se passait. Sa main tenta de le toucher mais elle n'avait pas la force de la bouger trop longtemps, avortant le mouvement. C'était lui qui s'occupait d'elle?

    "B... Bry.... où?", parvint-elle à articuler avec difficulté, "... où..."

    Elle devait savoir, elle voulait savoir si Bryne était morte ou vivante. Savoir si elle avait réussi à la tué et échoué à la suivre ou si elle avait encore une chance, même maigre de pouvoir se projeter avec son ancien lieutenant dans les ténèbres, encore une fois. Il n'y avait que ça qui était important pour Morwen; il n'y avait jamais eu que ça. La sueur collait quelques mèches rebelles à son front meurtri et la jeune femme se mit à pleurer réellement, sans se retenir. Ses cotes lui faisaient si mal mais peu importait. Dans un hoquet de douleur, la Kevii se força à se libérer de son angoisse et de sa souffrance pour se faire mal physiquement: cette souffrance lui rappelait qu'elle était vivante.

    "Br... b..... B-Bryne! Bryne!", hurla Morwen en pleurant toutes les larmes de son corps, s'accrochant avec ses maigres forces aux vêtements de Lucien.

    Il y avait en cette femme des trésors de volonté, bien que malsains. Elle était vigoureuse et courageuse, personne ne pourrait lui enlever et quand elle donnait l'impression de ne pouvoir se mouvoir, elle parvenait finalement à s'accrocher à quelqu'un, quelque chose. Quand elle donnait l'impression qu'elle sombrait, elle émergeait. Et quand elle faisait tout pour mourir, elle survivait. Morwen ignorait sis a chance était une bénédiction ou une malédiction, un poids ou un cadeau précieux. Son unique œil sombre tomba sur ceux de Lucien, et il lui sembla recouvrer un peu de lucidité.

    "L... Lu... c-ci... cien?", demanda-t-elle comme si elle ne parvenait à le voir, à le reconnaitre, "Luc... Lucien... f.. f... f-froid..."

    Morwen trembla à nouveau, prise par le froid de cette chambre creusée dans la roche malgré la chaleur de son ami près d'elle, qu'elle ne parvenait à chasser.
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Message Inevitabilis. I_icon_minitimeDim 2 Nov - 22:03

Tel un orage qui éclatait au-dessus d’une charmante petite tête blonde, les cris de Morwen déchiraient les cieux nuageux de mon cœur. Une divinité allait l’aider ? Si un homme n’y arrivait pas, personne n’allait se déplacer et à défaut de notre Maître et du Divin Arkhail, il n’y avait que les remèdes du Doyen et mes mains. En douceur, je soulevai Morwen qui tremblait de froid et de tristesse ce qui ne favorisait pas l’apaisement de ses sanglots puis j’ôtai ses bandages toujours avec minutie et pour lui apporter un peu plus de chaleur sans trop la toucher, je me débarrassai de ma toge pour la mettre sur la poitrine de ma Sœur dans la Ténèbres en laissant ses jambes découvertes et ainsi lui donner ma chaleur tout en lui promettant un minimum de pudeur. Je rapprochai la bassine, les bandages et les baumes et mit l’autre toge certes plus petite mais j’allais pouvoir la chauffer ainsi tout en nettoyant les blessures des jambes en premier, les rebander sans trop serrer.

- Une Roroa a sauvé Bryne. Demain, je retournerai à Laragon pour en savoir plus sur l’état de Bryne. Je t’interdis d’y retourner tant que tu n’auras pas réparé ton erreur auprès du Doyen, dis-je d’un ton neutre, me voulant un minimum autoritaire.

Elle avait failli compromettre notre famille mais peut-être avait-elle trouvé quelque chose qui allait la faire réfléchir tout comme moi alors que j’avais partagé une tente saturée d’effluves corporels succulents. En tous cas, elle valait la peine que l’on ne la tue pas pour ça. Morwen était capable d’encaisser et réfléchir. Si l’armée ne lui avait jamais donné cette opportunité, tant pis, nous étions les plus vernies dans cette histoire. Et pour en savoir plus, j’allais approcher l’ex-capitaine pour mieux comprendre ma Sœur bien-aimée, celle dont je pensais les blessures situées aux côtes à ce moment-là. Oui, elle allait souffrir mais c’était juste un pas de plus pour elle.

- Tu as intérêt de tout faire pour écouter le Doyen et récupérer ton dragon. Pour cela, tu vas devoir récupérer vite, Morwen. Je sais que je te fais souffrir mais chaque éclair de douleur te rapproche d’une leçon à retenir et d’une possibilité d’évoluer pour toi.

Je savais qu’elle n’allait pas tout saisir, je voulais encore une fois qu’elle entende ma voix, ni plus ni moins. Même si elle n’allait pas mourir, les Ténèbres prenaient des formes variées. Notre rôle était d’être ses agents et non ses victimes.

Et enfin, je m’occupai de son œil blessé sans dégoût, ni heurt. Elle avait toujours été aveugle et maintenant, elle était borgne physiquement comme psychiquement et elle allait devoir utiliser au mieux cet œil valide.

Les plaies nettoyées et protégées par des bandages propres, je quittai la pièce avec la bassine d’eau souillée en promettant de revenir vite et de nouveau la remplir d’eau chaude et claire pour nettoyer ses pieds, ses bras, là où la peau semblait égratignée et je la séchai avec une serviette pour la vêtir de la robe que j’avais réchauffée et remit la mienne.

Enfin, j’aidai ma rossa à regagner le lit.

- Maintenant que tu es plus calme, dis-moi pourquoi as-tu pleuré ?

Transmettre des ordres et protéger la famille.

Ainsi était ma douce cage dont je refusais de sortir.

Moi qui étais incapable de sortir des notes doucereuses de ma Lucia adorée pour diffuser l’espoir dans le cœur de n’importe quelle créature au monde, seule ma compagnie pouvait éventuellement réconforter.
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