[hrp : pour les besoins du rp, nous sommes en décembre dans ce poste, quelques jours après la publication du gouverneur de Keven]

*frouish*

Par réflexe, la main s'était refermée sur la lettre. Gwen regardait par sa fenêtre, ses yeux fixant au loin sa terre natale. Il lui était arrivé rarement d'avoir le mal du pays, mais cette fois-ci, elle aurait aimé être auprès des
siens, les supporter et les aider comme elle aurait dû le faire après ses années d'études à l'académie. Cela lui semblait si loin maintenant...

Maintenant, c'était de jeunes étudiants qui avaient besoin d'elle, surtout qu'ils auraient surement la même pensée que la professeure à l'instant : tout quitter pour aller rejoindre leur famille et les aider à combattre dans le feu de l'action. Ce serait surement la pire erreur à faire. S'installant à son bureau, Gwen sortit une plume et une pile de billets. Elle contacterait les étudiants pour les inviter à discuter de la situation et de voir ce qu'il y avait à faire avant de se jeter tête baisser dans les combats. Elle y passe de longues heures à écrire ses mots avant d'aller les porter dans les boites aux lettres des étudiants concernés...

___

La classe de survie était propre et bien rangée. Aucun pot ne semblait vouloir tomber de l'armoire et les pupitres étaient impeccables. Et chose étonnante, Gwen était déjà là. Son air sévère n'augurait rien de bon, elle n'avait rien de la lunatique habituelle qui oubliait tout. Même sa tenue avait quelque chose d'étrange, d'austère. Ses pantalons de cuir tanné qui lui moulaient les jambes et sa blouse à frisons de différents tons de verts la feraient presque disparaître naturellement dans les bois, même sans son don de camouflage. Surtout, ce qui était étrange, c'était l'immense bâton de bois, incurvé d'un côté comme s'il s'agissait autrefois qu'une branche d'arbre en forme d’Y et qu’on y avait coupé l'une des deux branches. Il trônait sur le mur, derrière Gwen.

Certains élèves oubliaient parfois que les professeurs avaient été à leur place et avaient suivi la même formation et que si Gwen semblait si étrange parfois, elle n'en avait pas moins été formée pour devenir une guerrière! Il est vrai qu'il s'agissait plus pour son cas de faire part à de l'espionnage plus qu'à aller au front, mais la formation militaire n'en est pas moins importante.

Peu à peu, les étudiants entraient dans leur salle de classe pour un évènement qui était très différent d'un cours. Il y avait là des étudiants de toutes les années, la majorité étant des Terra, mais quelques-uns provenaient d'autres classes. Certains étaient au courant de tous les détails qui se passaient sur Keven, ayant reçu des lettres de leur famille, mais ce n'était pas le cas pour tout le monde. La classe se remplit rapidement, il n’y avait pas assez de chaises pour tout le monde, mais certains prirent l'initiative de se placer sur les bureaux, Gwen ne releva pas la faute. On était en temps de guerre.

— Bonjour à tous et merci d'être venu en si grand nombre.

Elle prit un temps, s'assurant d'avoir l'attention des étudiants. Ceux-ci étaient étrangement silencieux, tant par le contexte que par l'étrangeté de la situation.

— Certains d'entre vous sont déjà au courant, mais je me permets pour les autres de rappeler les faits qui ne sont hélas pas une rumeur infondée. Vous êtes tous ici présents des natifs de Keven, que votre dragon allié soit de terre ou non ne change rien en votre pays d'origine c'est pourquoi je vous ai tous convoqués aujourd'hui.

Prenant un autre temps, Gwen sortit de sa poche une lettre qui semblait avoir été froissée à de nombreuses reprises, mais qui était bien pliée cette fois-ci.

— Le gouverneur de Keven a publié cette lettre il y a peu de temps et j'ai reçu également des nouvelles de ma tribu qui parcourt le territoire, m'affirmant que c'est bien le cas. Je vous la lis...

Gwen leur lisa la lettre du gouverneur dans son intégralité. La tension était palpable dans la salle, certains se collaient pour rechercher du réconfort, d'autres ne voulaient qu'aller se battre pour défendre les siens. Imposant de ses mains le silence, Gwen reprit la parole.

— Il va sans dire que les temps vont devenir plus difficiles à partir de maintenant. C'est pour cela que vous êtes en formation et que ceux avant vous l'ont été, pour prévenir cette situation latente depuis très longtemps. Cependant, je ne peux vous conseiller de vous rendre auprès des vôtres. Pour le moment, Laragon est encore en sécurité et tant et aussi longtemps que c'est le cas, mieux vaut en profiter pour mettre le temps de notre côté et de profiter de chaque leçon que vous aurez en ces murs, ils seront vos meilleurs atouts lorsque vous sortirez d'ici ou s'ils arrivent avant...

Gwen prit un profond soupir, sachant que ce n'était peut-être pas ce que les étudiants souhaitaient entendre et maintenant, c'était le plus difficile à gérer qui arrivait.

— Je vais prendre vos questions...

Déjà, plusieurs mains se levaient... Gwen prit plusieurs questions avant d'y répondre...

La nouvelle de la guerre s'était répandue comme une traînée de poudre, depuis quelques jours, Jillah était pâle comme un linge, son père ne lui avait même pas envoyé de missive pour la prévenir, sa sœur non plus. Sur le coup, elle en avait conçu de la colère, la mettre ainsi à l'écart et l'obliger à l'apprendre de quelqu'un d'autre, c'était injuste! Puis, Salaun l'avait tempérée et lui avait demandé de réfléchir un instant, son père était un proche du gouverneur, pas la peine de mettre les Wyrms au courant que la fille du premier conseiller de celui-ci était à l'académie Lindorm. Et même s'ils le savaient déjà et ne comptaient rien faire la concernant, autant éviter de tenter le diable, dans le doute.

La jeune fille s'était donc calmée et avait continué à suivre les cours avec assiduité, comme si de rien n'était, ou presque. Son inquiétude était palpable bien qu'elle n'en laisse rien paraître.

****

Et voilà, c'était l'heure de la réunion organisée par leur professeur Principale pour parler de ce qui se passait dans sa région natale. Nul doute qu'il y aurait des élèves des différentes classe présents à cette réunion.

Salaun la soutenait mentalement et c'est d'un pas décidé qu'elle se rendit dans la salle de classe. Il y avait déjà quelques élèves, elle reconnut une bonne partie de sa classe et en découvrit d'autres qu'elle avait sûrement déjà croisé dans le couloir sans vraiment leur prêter attention. Pourtant, dans ce contexte inquiétant et angoissant, elle se surprit à vouloir graver le visage de chacun d'eux dans sa mémoire.

Elle avança et s'assit au deuxième rang, les mains serrées l'une contre l'autre sur la table, attendant que tout le monde soit là pour écouter ce que Mademoiselle Garon avait à leur dire.

Lorsqu'elle rappela les faits, Jillah crispa ses mains tellement fort que ses jointures blanchirent. Il n'y avait pas un bruit dans la salle de classe lorsqu'elle s'exprima, tous les élèves avaient la mine grave, même si certains s'exclamaient discrètement quand d'autres serraient les poings. Des voix commencèrent à s'élever lorsque leur professeur se tut quelques instants avant d'imposer de nouveau le silence pour pouvoir poursuivre.

Jillah prenait sur elle pour ne pas demander une permission spéciale pour pouvoir rentrer, elle savait que Mademoiselle Garon avait raison. Celle-ci leur laissa ensuite la parole.

Le silence se fit durant un temps qui lui parut long avant qu'un jeune homme d'une vingtaine d'année environ ne lève la main, il s'agissait d'un élève Fulgère:

-Le gouverneur dit que les wyrms enlèvent des gens et prennent des otages en évitant de tuer lorsque c'est possible...à votre avis, qu'est-ce qu'ils cherchent?

Jillah frissonna malgré elle et leva la main à son tour:

-Est-ce que des...des proches du gouverneur ont eu des ennuis?

La jeune fille se mordilla la lèvre, n'ayant pas de nouvelles de sa famille, elle ne pouvait s'empêcher de s'inquiéter.

L'un des étudiants d'une autre classe fut le premier à poser une question. La glace était brisée. La question était délicate, qui pouvait bien savoir ce que pensaient les Wyrms? Néanmoins, Gwen tenta de répondre le mieux possible.

— Personne n'a de réponse exacte à cette question, mais à mon avis, ils tentent une façon différente de recruter. Au départ, il s'agit tout simplement de gens qui ont échoué leur épreuve d'alliance, mais qui ont tout de même lié leur sang avec un dragon et reste en leur compagnie. Ce contact prolongé étant illégal par les lois de Limlug, ils se sont exilés dans des territoires inconnus. Peut-être veulent-ils trouver une façon différente de recruter des gens pour leur cause.

Une autre étudiante leva la main, plus anxieuse. À sa question, Gwen l'observa bien, replaçant alors la jeune fille dans sa mémoire. Question justifiée à son avis... Avant que Gwen ne lui répondre, la porte ouvrit, laissant place à un autre étudiant. Gwen n'était pas du genre à dire quelque chose sur la ponctualité, étant elle-même du genre distraite. Elle attendit donc que le jeune garçon prît place avant de répondre.

— Nous ne savons pas à présent qui a été enlevé. Je n'ai pas reçu de liste des noms, mais les gens qui bravent les interdits du gouverneur sont généralement les plus pauvres de la société ou des jeunes un peu trop téméraires...

Elle appuya sur ses derniers mots afin de bien faire comprendre aux jeunes de ne pas faire d'idioties. Dans le silence de la classe, elle entendit la question discrète du jeune garçon. Approchant de sa place, elle s'accroupit à sa hauteur, posant une main rassurante sur sa tête.

— Non, personne ne part pour le moment. Nous sommes peu d'adultes dans l'Académie pour veiller à votre protection et nous aurons besoin de tout le temps disponible avant leur arrivée à nous pour vous former. Espérons par contre que ce temps limite n'arrive pas.

Se relevant, Gwen retourna devant la classe.

— D'autres questions?

"Recruter"...Jillah écouta la réponse que son professeur donna à l'élève fulgère avec attention. Se pouvait-il que des personnes enlevées finissent par rejoindre les rangs des wyrms et se battent contre leur propre patrie? La jeune femme avait du mal à l'imaginer, mais c'était la seule explication possible, en dehors d'un argument de poids. La vie de leurs otages contre la reddition de Keven.

Sans accepter leurs méthodes, la jeune fille comprenait les motivations des rebelles, si celles-ci étaient effectivement de simplement vouloir vivre avec leur dragon sans être obligés de s'exiler. Après tout, qu'est-ce que Limlug avait contre ça?

Mais ce qui la tracassait le plus était la sécurité de sa famille et des amis qu'elle avait là-bas, elle ne put donc s'empêcher de poser la question qui lui brûlait les lèvres. Mademoiselle Garon allait répondre quand un élève fit son entrée. Plusieurs têtes se tournèrent vers lui, Jillah le suivit des yeux jusqu'à ce qu'il s'assoit, il s'agissait d'un garçon de sa classe.

Si elle lui en voulut d'avoir retardé la réponse qu'elle attendait, elle n'en laissa rien paraître et se retourna pour faire face à son professeur principal. Celle-ci attendit que tout le monde soit attentif avant de lui répondre. Malheureusement, elle n'en savait pas plus sur la liste des personnes enlevées. Ses arguments se tenaient, mais connaissant son père, il ne resterait pas caché dans son bureau, il était un guerrier dans l'âme.

La jeune fille acquiesça cependant d'un signe de tête et prêta attention à la suite, l'élève retardataire était bouleversé par les évènements. Jillah se retourna pour pouvoir entendre ce que mademoiselle Garon lui disait. La perspective de voir des wyrms débarqués perturba certains élèves, même la jeune fille n'en menait pas large. Elle y avait déjà songé et cette possibilité était loin de l'enchanter. Alors, elle ferait son possible pour se préparer à les recevoir.

Une élève de deuxième année leva timidement la main:

-Mademoiselle...cette situation nous empêche de rentrer à Keven n'est-ce pas? Tant que les wyrms sont là-bas, nous sommes obligés de rester ici et nous ne pourrons plus voir notre famille tant que...tant que ce n'est pas fini...

Cette constatation jeta un froid sur l'assemblée. Ils étaient tous coincés ici sans possibilité de voir les gens qu'ils aimaient et qui étaient à Keven. C'était presque comme un exil forcé.

Jillah serra les poings, elle trouverait bien un moyen de voir sa famille. Ne pas les voir, ne pas savoir ce qu'ils devenaient, c'était trop dur à supporter. Elle ne pourrait jamais rester sagement ici, c'était impossible. Surtout que personne ne savait combien de temps cela allait durer, et les Wyrms n'allaient sans doute pas se contenter d'attaquer Keven...Si la Nation tombait...non c'était impossible, la jeune fille refusait simplement d'imaginer que cela soit possible.

Gwen sentait les regards anxieux poindre sur elle. C'était encore des enfants pour la plupart, des enfants qui arrivaient dans la dure réalité des adultes. Gwen se devait d'être forte, pour eux, pour leur montrer qu'il était possible de s'en sortir malgré tout.

— Comme je l'ai dit, rien ne vous en empêche. Il est possible que les transports soient retardés, que ce soit pour Keven ou pour toute autre région. Même chose pour le courrier, dont je vous encourage fortement de faire...

Elle prit un temps que cette information passe dans les esprits des étudiants avant de poursuivre.

— Cependant, vous n'êtes pas en mesure de combattre pour le moment. Tant que votre apprentissage n'est pas terminé ici, vous ne valez guère mieux que les soldats des villes. Par contre, avec la fin de vos cinq années, vous rejoindrez l'escadron d'élite, en compagnie de votre dragon et pourrez démontrer alors toutes vos capacités. Vous ne serez pas tous au front, certains iront dans la section de l'espionnage pour anticiper les mouvements, d'autres seront messages pour rallier ensemble les différents groupes aux fronts et il y aura le groupe des soigneurs. Toutes ses sections sont importantes et c'est maintenant que vous devriez songer à la section militaire qui vous convient le plus, tant par votre personnalité que par le don transmis par l'alliance.

Gwen ponctuait ses phrases de quelques pauses et de gestes calculés et précis. Elle captait ainsi mieux l'attention des autres élèves.

— Mon avis personnel est tout de même que vous restiez ici. Vous en faites ce que vous voulez de cet avis, mais n'hésitez surtout pas à venir me voir dans mon bureau s'il y a quoi que se soit. Il n'existe pas de questions stupides et si vous ne vous sentez pas bien, n'hésitez pas à m'en parler. Je n'ai peut-être pas toutes les réponses, mais je peux vous aider à les trouver le cas échéant.

S'assurant qu'il n’y avait plus de questions, Gwen libéra les étudiants.

— Je vous laisse retrouver à vos occupations. Je vous tiendrai au courant des avancées du conflit en temps et lieu...

Les étudiants se levèrent dans un silence poignant. Quelques murmures le brisèrent rapidement, mais on n'assistait pas à un départ d'une classe normale. Il ne semblait plus y avoir grand-chose qui serait normal à présent.

[pour ma part, c'est terminer, mais je vous laisse terminer votre sortie]

L'ambiance était loin d'être à la fête, le silence régnait en maître et tous les élèves buvaient les paroles de leur professeur Principal, qu'ils soient d'accord ou non avec elle.

Jillah se mordilla la lèvre, elle avait tellement envie de voir sa famille, ne serait-ce que pour s'assurer que tout le monde allait bien...peut-être plus tard.
Les Terra les plus âgés, eux, devaient absolument décider quel corps de l'armée ils comptaient intégrer une fois la cinquième année terminée. Elle aussi y réfléchissait, seulement elle n'était qu'en première année, elle n'irait pas se battre demain, ce qui la rassurait un peu.

Pourtant, elle restait persuadée que si elle voyait un wyrm s'en prendre à une personne chère à son cœur, elle n'hésiterait pas à lui rentrer dans le lard! Une fois que Miss Garon leur eu dit tout ce qu'elle avait à dire pour les conseiller, elle les invita à venir la voir plus tard, puis à sortir de la classe.

La jeune fille jeta un coup d’œil à ses camarades et s'arrêta à la hauteur de son professeur, un petit sourire aux lèvres:

-Merci, Mademoiselle Garon...

Puis, elle suivit ses camarades qui sortirent de la classe dans un calme relatif avant de se diriger vers les refuges. Elle avait vraiment besoin de voir Salaun.